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ouvert aux contribuables. Cette distinction rend praticables aux villes et aux départemens des reboisemens spécialement coûteux, qui seraient onéreux aux capitalistes ; par exemple, l’emprunt de 422 millions pour le reboisement de terrains à 2 500 francs l’hectare, dont M. Daubrée a dressé le devis dans son rapport à la Commission des inondations, serait devenu pour la Ville de Paris un extincteur automatique de sa dette, si elle l’avait effectué depuis soixante ans ; car la coupe principale de 960 millions, correspondant à une recette renouvelable tous les soixante ans de 6 000 francs par hectare sur 160 000 hectares, lui permettrait aujourd’hui de rembourser les 422 millions empruntés et d’affecter 538 millions à l’amortissement ; puis les 760 millions d’intérêts à 3 p. 100 qu’il eût fallu payer pour le service de l’emprunt seraient productifs d’une recette de 960 millions tous les soixante ans.


Les facilités d’administration sont bien plus grandes pour les valeurs mobilières et pour les immeubles urbains que pour les immeubles ruraux, et le « retour à la terre, » si désirable au point de vue social comme au point de vue moral, en est considérablement entravé. La part que les capitalistes affectent par mesure de sécurité au placement en terres diminue constamment et ne comprend guère que des propriétés affermées.

Que devient dans ces conditions la situation de la propriété forestière ? Affermer une forêt, c’est la condamner à mort ; et la solution adoptée dans certaines régions, où le propriétaire la fait administrer par un gérant intéressé qu’il rémunère par l’abandon d’une fraction déterminée du prix des coupes, aboutit également à la ruine de la forêt. Quant à la gestion personnelle, fort compliquée par elle-même, elle ne saurait être que le fait du propriétaire habitant sur place, et reste en dehors des méthodes appliquées à l’administration des placemens.

Il est aisé de remédier à ces difficultés d’administration de la propriété forestière par l’adoption de la loi « tendant à favoriser le reboisement et la conservation des forêts privées, » que la Chambre a votée le 12 mai 1909, pour permettre aux propriétaires d’en confier la gestion au plus éclairé des sylviculteurs, au service forestier de l’Etat.

En ce qui concerne plus spécialement la facilité du reboisement, les capitalistes ne pourront l’avoir pratiquement avant