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n’être point mis en suspicion par le fisc, renoncerait généralement à la majeure partie de ce dégrèvement qui ne serait qu’apparent, et le but serait loin d’être atteint. Le droit fixe donnerait une modeste prime au reboisement, ce qui est de toute justice.

Il est arrivé à des propriétaires, après avoir acheté des terres incultes pour les reboiser, d’y voir affluer tous les troupeaux du voisinage sous prétexte de servitudes dont ils n’avaient nulle connaissance, et de ne pouvoir ni les clôturer ni les planter sans avoir à soutenir une série illimitée de procès. C’est à cet objet que répond la proposition de loi sur « la déclaration des servitudes occultes. »

En ce qui concerne la vente des forêts, il est d’abord à remarquer que les immeubles de ce genre ne sont généralement pas décomposables, et que l’importance de leur prix réduit considérablement le nombre des acquéreurs.

Ce nombre est encore rétréci par la législation, qui exclut de la propriété forestière les associations, les caisses d’épargne, les syndicats et la plupart des possesseurs impérissables, les plus aptes cependant à envisager les opérations à long terme d’une sylviculture éclairée. On doit espérer que le Sénat supprimera sans tarder cet obstacle au reboisement en adoptant la loi « tendant à favoriser le reboisement et la conservation des forêts privées, » à laquelle le gouvernement a donné son appui, et dont il a déclaré l’urgence le 4 mars 1910.

Restent les particuliers. Ceux qui sont majeurs et en possession de toutes les capacités civiles ne relèvent que de leur volonté, et personne ne peut leur interdire d’acheter des forêts avec les fonds en leur possession. Quant aux mineurs et autres incapables, le tuteur chargé d’administrer leurs biens doit en référer au Tribunal civil, où il n’est pas dans les usages d’autoriser ce genre d’achat, que le tuteur pourrait aisément exploiter à son profit. Le code forestier s’occupe fort peu des bois particuliers, et le code civil méconnaît le capital-bois, cette partie essentielle de la propriété forestière, dont la conservation présente un intérêt public de premier ordre. Les articles qui obligent l’usufruitier à se conformer à l’aménagement pouvaient avoir quelque valeur quand l’ordonnance de Colbert, qui contenait des prescriptions sur la gestion des forêts privées, était encore en vigueur ; mais, depuis qu’elle a été abrogée en