— Ebbene ! grommela le fils de Teresa... moi, je me charge d’étrangler la jeteuse de sorts,
— Non ! riposta durement le moine... Dieu seul a le droit d’accomplir l’œuvre de ses Vengeances.
Alors, replaçant la main sur l’épaule de son guide, il voulut se mettre en route ; mais Sant’Angiolo lui barra le passage.
Le protégé de Diva s’était tenu à l’écart, près de moi, tandis que je croquais la béate figure d’une contadine. L’histoire du « Chien rampant » l’avait mis en liesse, et, tout en fumant son dixième Virginia, il philosophait :
— Astaroth ?... Mme de Campofiori, j’imagine !... Tout à l’heure nous allons rire, quand je saluerai la princesse par cette appellation biblique... Astaroth !
— Vous êtes nombreux, en ce moment, au Palazzo ?
— Une douzaine de gais compagnons ! Les théâtres et les cafés-concerts de Naples nous ont fourni leur contingent de camarades. Chaque soir, on soupe, on danse, on fait bamboche. Amusons-nous, que diable ! La vie est si courte, et... Mais notre bonhomme veut s’en aller ; rejoignons-le.
Il courut vers le religieux, puis cavalièrement se campa devant lui :
— Excusez-moi, vénérable monsieur, je désire, moi aussi, vous présenter ma requête.
Le sans-gêne d’une telle apostrophe déplut sans doute au « vénérable monsieur, » car il poursuivit son chemin :
— L’Angélus vient de sonner ; il se fait tard : je n’ai guère le temps de vous écouter, mon ami.
Mon ami ?... Quelle dédaigneuse familiarité !... La voix du baryton gronda comme une basse profonde :
— Je suis Angelo di Sant’Angiolo, l’artiste lyrique. Ce nom vous est peut-être connu.
— Très inconnu, monsieur... Les rumeurs de vos théâtres ne montent pas jusqu’à ma cellule.
— Parbleu ! Vous perchez si haut à la Campanella.
— Pas si haut cependant que le bruit de honteux scandales ne puisse y parvenir.
— Je ne comprends pas... On vous dit savant, mon estimable monsieur ; peut-être allez-vous m’aider à résoudre un problème historique.