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d’attendre que l’Italie du Nord fût délivrée des Français et que les bandes royalistes, qui se formaient en Calabre à la voix du cardinal Ruffo, eussent remporté quelques succès.

Dans ce langage, Gallo trouvait la preuve des intentions de l’Autriche. Il discernait une part de mauvais vouloir qu’il attribuait à la politique égoïste de cette puissance beaucoup plus préoccupée des moyens de s’agrandir que de favoriser la cause commune : il voyait là un danger, lequel ne pouvait être conjuré que par l’intervention de la Russie :

« La Russie, mandait-il à Palerme, est la seule puissance qui puisse faire marcher l’Autriche à la cravache par la crainte qu’elle inspire. Elle empêchera cette dernière de faire des acquisitions exagérées parce qu’il ne lui convient pas que sa voisine s’agrandisse en territoire et en sujets et obtienne une consistance menaçante pour la Russie elle-même. »

Tel était, trois mois après l’arrivée de Gallo à Vienne, l’état de la négociation dont il était chargé. Fort heureusement, les circonstances, durant ces trois mois, s’étaient profondément modifiées par suite des revers subis par les armées françaises dans le Nord de l’Italie. Dès le printemps de 1799, la coalition qu’on a vue se préparer à la fin de l’année précédente, était devenue une réalité. En l’absence de Bonaparte alors en Egypte, la République apercevait ligués contre elle la Russie, l’Autriche, l’Angleterre, Naples, le Portugal et la Turquie, laquelle seule n’était pas encore entrée en campagne. Ces puissances avaient mis sur pied 300 000 hommes qui marchaient en Allemagne, en Suisse, dans le Tyrol et en Vénétie. C’était le double de ce dont pouvait disposer la France dans ces divers pays. Dès l’ouverture des hostilités, tout est malheur pour les armées républicaines ; partout, elles sont obligées de reculer. Jourdan, Scherer, Bernadotte, Moreau lui-même sont successivement battus par l’archiduc Charles et par Souvaroff.

On sait que ces défaites ne devaient être que passagères. Dès le mois de septembre suivant, la République prendra sa revanche en infligeant de sanglans revers à ses vainqueurs d’un jour. Mais, cette revanche, qui déjouera les calculs des puissances et brisera la seconde coalition, on ne la prévoyait pas à l’heure où le marquis de Gallo négociait à Vienne. Les grandes cours s’abandonnaient à toutes les ivresses des victoires de leurs soldats. Si le marquis de Gallo avait été homme à se décourager