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parure. Occupant son poste depuis 1782, s’étant marié avec une sujette russe, la fille du prince Wiamenski, et persona grata dans le monde de la Cour, il était, à un plus haut degré qu’aucun de ses collègues, en possession de l’estime et de la confiance de l’Empereur. Il les avait conquises par la sagesse de ses conseils, par ses manières franches et loyales. Il leur devait d’avoir mené à bonne fin les négociations qui avaient abouti, le 29 décembre 1798, à un traité d’alliance offensive et défensive entre Naples et Saint-Pétersbourg. Annoncé à Serra-Capriola, comme chargé d’une mission confidentielle, le marquis de Gallo déclare à plusieurs reprises dans ses rapports qu’il a trouvé dans son collègue le collaborateur le plus dévoué, et il se plaît à rendre hommage à l’activité, au zèle, au talent avec lesquels celui-ci n’a cessé de s’acquitter de ses fonctions : « L’estime fort grande qu’il a su se concilier auprès de ce souverain et de ce ministère, l’influence qu’il a su acquérir sont devenues si efficaces, que tout ce que le Roi a obtenu, et toutes les conséquences heureuses qui s’ensuivront seront dues aux bons offices du chef de la Légation des Deux-Siciles. »

On ne saurait être ni plus bienveillant ni plus modeste, et d’après ce langage, nous devons supposer que Serra-Capriola a secondé de tous ses efforts les démarches de l’envoyé extraordinaire du roi de Naples. il était patriote et consciencieux, et les ordres de son souverain lui étaient sacrés. Est-ce à dire que, dans le fond de son cœur, il ne ressentit pas quelque mécontentement en apprenant qu’on avait confié à un autre que lui une mission pour laquelle sa situation auprès du gouvernement russe le désignait, et qu’il était mieux que quiconque en état de remplir ? Le témoignage du chevalier de Bray ne permet pas de l’affirmer. Lorsque la mission du marquis de Gallo eut échoué et lorsque l’échec fut connu, l’envoyé bavarois, après avoir rendu compte de l’incident, ajoutait : « Dès lors, la faveur dont le marquis de Gallo avait joui se dissipa entièrement, ce à quoi le duc de Serra-Capriola, jaloux de voir là un autre ministre de sa cour, contribua bien un peu pour sa part. » Il confirme ce dire dans un autre rapport : « Le duc de Serra-Capriola, écrit-il, le voyait d’un œil inquiet, ce qui a influé sur la mission politique de M. de Gallo. »

Il est bien évident que, quoique de Bray, arrivé à Saint-Pétersbourg le 14 novembre seulement, n’eût fait qu’entrevoir