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Gallo qui partit le 19, son langage était l’écho des propos fondés ou non qui se tenaient couramment dans cette capitale. Quoi qu’on pense à cet égard, il faut reconnaître que la conduite de Serra-Capriola fut en apparence irréprochable.

C’est lui qui, le 2 juillet, conduisit le marquis de Gallo chez le comte de Rostopchine, chancelier de l’Empire. Dans ce premier entretien, on ne toucha qu’en passant aux questions que l’envoyé de Naples avait mission de traiter avec l’Empereur. Il remit cependant au chancelier une note qu’il avait préparée à l’avance et qui démontrait la nécessité de faire marcher vers Naples le corps de troupes russes qui, dans la volonté du Tsar, était destiné à cet emploi et que l’Autriche avait détourné de sa destination pour l’employer à son profit. A l’appui de cette requête, Gallo invoquait le traité d’alliance récemment contracté par son maître avec la Russie et demandait que la cour de Vienne fût mise en demeure d’en finir une bonne fois pour toutes « avec des changemens et des incertitudes » qui paralysaient le bon vouloir de Paul Ier ; Cette mise en demeure s’imposait, dût-elle provoquer une crise entre les intéressés. Rostopchine parut approuver le raisonnement de Gallo, mais en alléguant qu’à l’Empereur seul il appartenait de décider.

Le dimanche suivant, Gallo fut reçu à Pavlowsky par l’Empereur. Il constate avec satisfaction la courtoisie et la bonté qui lui furent témoignées au cours de cette audience toute confidentielle. Elle ne dura pas moins d’une heure et demie. Seul avec l’auguste interlocuteur, il put donner libre cours à toutes les considérations qu’il s’était promis de faire valoir. Ce qu’il ne dit pas dans ses rapports, mais ce qui nous est révélé par le chevalier de Bray, c’est que, parmi les décorations dont il s’était revêtu pour se rendre à l’audience impériale et qu’il promena ensuite dans les salons russes, figurait celle de la Toison d’Or qu’il avait reçue de l’empereur d’Autriche après la signature du traité de Campo-Formio et dont Bonaparte, voulant reconnaître la part qu’il avait prise aux négociations, lui avait donné les insignes en brillans. Il ne cachait pas qu’il les tenait de lui. Le Tsar, qui le savait, fut mal impressionné en voyant sur sa poitrine ces insignes qui lui rappelaient une paix qu’il jugeait funeste et un ennemi avec qui, en ce même moment, il était en guerre. Néanmoins, on ne sut que plus tard qu’il en