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ambassadeur. Selon lui, les questions adressées aux puissances par le Cabinet de Saint-Pétersbourg étaient prématurées aussi bien que la proposition de Congrès. Néanmoins, s’expliquant sur le premier point avec le comte de Woronzoff, il lui déclara que les intentions de la Grande-Bretagne étaient favorables au rétablissement de la monarchie en France, sans laquelle on ne pouvait compter sur une paix durable, mais que, quant aux intentions des alliés, il fallait attendre pour les leur demander que la guerre eût pris fin. Toute résolution différente ne pourrait que nuire à la cause commune. Lorsqu’on serait en état d’imposer la paix à la France, il serait temps pour les alliés de se réunir en Congrès. Il faisait en outre observer que pour une réunion de ce genre, il fallait préférer à Saint-Pétersbourg un lieu de rendez-vous plus central, afin d’assurer aux Cabinets intéressés la rapide transmission de leurs dépêches.

Le silence de l’Autriche et la réponse du Cabinet de Londres ne pouvaient que déplaire à l’empereur de Russie, puisqu’ils équivalaient à un refus, c’est-à-dire à l’échec de sa démarche. La réponse anglaise était à Saint-Pétersbourg vers la mi-septembre. Bientôt après, arriva celle de l’Autriche. Il n’y était rien dit des questions posées par l’Empereur, et la proposition de Congrès en faisait tous les frais. Elle se résumait en ceci, que l’Autriche répugnait à communiquer ses plans à d’autres puissances que la Russie, et ne voulait pas ouvrir le Congrès aux Etats secondaires. Elle entendait traiter uniquement et secrètement avec l’empereur Paul et exclure ses autres alliés.

Elle donnait ainsi raison au jugement que portait le marquis de Gallo : « L’Autriche veut tout pour elle et elle entrave pour ne pas dire qu’elle réduit à néant tous les efforts combinés à l’effet d’établir un système qui conviendrait à tous les intéressés. » Elle justifiait également les craintes qu’exprimait le marquis de Circello, le ministre de Naples à Londres : « Si l’on ne veille plus qu’attentivement, il se produira un fait surprenant : l’Italie sauvée des griefs de la Révolution française n’en restera pas moins asservie si les menées du baron Thugut ne sont pas battues en brèche par les forces coactives des alliés. »

Mais, tout en persévérant dans son système de dissimulation, l’Autriche n’en comprenait pas moins la nécessité de disposer