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féconde de beautés que le climat et les mœurs des Grecs avaient su rendre inépuisable. Tout exige donc que ceux qui professent aillent dans son pays natal en rechercher les germes précieux pour l’empêcher de dégénérer et de s’abâtardir sous des cieux qui lui sont étrangers. »

C’est bien mal raisonner. La conséquence des prémisses posées est qu’il faut renoncer à cette architecture, ou bien que, si on l’emploie, il faut la modifier pour l’adapter à nos mœurs et à nos besoins, plutôt que de se borner à répéter des formes convenant à des mœurs étrangères. Il faut qu’elle soit traitée par des architectes qui, comme ceux du XVIIe siècle, sachent la transformer pour lui donner une vie nouvelle.

Quelques exemples suffiront à montrer quelle fut l’ingéniosité de ces maîtres dans l’emploi des formes classiques et à prouver la légitimité de leurs innovations.

C’est dans l’emploi des formes du fronton qu’ils ont montré le plus d’indépendance et de nouveauté. Si le fronton n’est plus employé uniquement comme terminaison d’une toiture, si sa ligne angulaire est considérée simplement comme agréable aux yeux, et pouvant être utilisée très heureusement comme une forme terminale quelconque, on comprend alors que rien ne s’oppose à toutes les variétés qu’on peut lui donner : de là le type du fronton rompu, de ce fronton qui s’entr’ouvre pour donner place à un motif de sculpture, forme qui a eu le plus grand succès jusqu’à nos jours ; de là ces frontons cintrés qui épousent les lignes d’une corniche courbe, de là les formes plus audacieuses des frontons superposés ou emboîtés les uns dans les autres, des frontons se brisant en ressauts successifs, se contournant, se compliquant, se chargeant d’ornemens, pour produire les effets les plus riches et les plus imprévus. Partout nous trouvons d’intéressans exemples de ces formes, notamment à l’intérieur des églises, dans les parties que l’on veut le plus brillamment décorer : les autels du Gesu et de Saint-Ignace donnent de magnifiques exemples de la somptuosité à laquelle ces formes peuvent atteindre ; si on les terminait par des frontons classiques, toute leur beauté s’évanouirait.

Dans l’ornementation des frontons, une des idées les plus heureuses a été l’emploi de statues ; cette idée fut féconde en résultats, non seulement dans des monumens de petites dimensions tels que les autels, mais aussi dans les façades d’églises.