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un nouveau et parfait modèle dans son église du Gesu. Mais il faut parler de la dernière œuvre de Maderne à Saint-Pierre, de la façade, dans laquelle on peut dire que, plus que dans la partie intérieure, il se montra novateur. Après les façades construites par la Contre-Réforme avec des idées de simplicité et d’utilité, Maderne, reprenant en partie à Saint-Pierre les conceptions de Michel-Ange, réintroduit dans l’architecture le sentiment de la beauté et de la grandeur. La colonne, à laquelle on avait renoncé depuis plus d’un demi-siècle, réapparaît dans cette façade qui s’ordonne tout entière dans la majesté d’un portique solennel.

Toutefois, il faut convenir que cette façade est la partie la moins belle de Saint-Pierre. Lorsqu’on s’avance vers la Basilique, dans l’encadrement de la colonnade du Bernin, et qu’on a devant les yeux la coupole de Michel-Ange, il est certain que la façade de Maderne n’est pas très séduisante. Si la réussite n’en fut pas meilleure, ce n’est pas qu’elle soit l’œuvre d’un architecte de peu de génie ou de peu de goût, ni d’une époque incapable de produire une œuvre plus belle, c’est qu’elle devait être établie dans des conditions tellement particulières et anormales, sa construction était hérissée de tant de difficultés, qu’une solution plus heureuse semblerait peu facile à trouver.

Maderne avait à tenir compte d’une première nécessité, celle d’ouvrir dans la façade une loggia du haut de laquelle le Pape, dans tout l’appareil des grandes cérémonies, pourrait donner sa bénédiction Urbi et Orbi. La façade, de ce chef, ne pouvait plus s’ouvrir directement sur l’église et devait s’ordonner comme un portique à deux étages. De là cette multiplication de portes et de fenêtres que Maderne atténue autant que possible, cherchant à dissimuler l’émiettement de ces divisions, en les englobant dans une grandiose colonnade qui embrasse toute la largeur de la façade et s’élève jusqu’à la corniche terminale. C’est comme le portique d’un temple antique, mais, au lieu d’être en avancée, il se plaque sur la muraille ; et, par d’ingénieux espacemens de colonnes, Maderne marque la porte d’entrée et la division centrale correspondant à la grande nef de l’église.

Enfin Maderne devait se préoccuper de masquer le moins possible la coupole de Michel-Ange. L’allongement de la grande nef avait eu le fâcheux résultat d’affaiblir l’effet que la coupole