Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 8.djvu/435

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
431
MULHOUSE.

profession importante à l’époque, et fut reçu à la tribu des tailleurs. Son petit-fils. Jean, chef de la tribu des maréchaux, puis sénateur, avait acquis le droit de bourgeoisie et par son mariage était entré dans le groupe des vieilles familles patriciennes : sa fortune atteignait déjà 1 250 000 francs. Après lui la situation des Dollfus avait continuellement grandi. Gaspard, fils de Jean, commençait en 1618 la longue liste des bourgmestres issus de la famille et par ses trois mariages et ses spéculations sur les terrains développait encore sa maison. Jean Gaspard, fils de Gaspard, vingt-cinq ans bourgmestre et sénateur, faisait en 1663 partie de la délégation d’honneur envoyée à Louis XIV pour le renouvellement de l’alliance entre la Confédération suisse et la France. Les descendans des branches cadettes montraient la même énergie et la même intelligence, particulièrement ceux de Jean Dollfus, bourgmestre de 1710 à 1716, et qui se divisent eux-mêmes en trois branches, dites, d’après les hôtels qu’ils habitaient, de la Cour de Lorraine, de la Cour des Trois-Rois, de la Cour du Chapitre. Chefs de tribus, sénateurs, bourgmestres, ils jouent un rôle considérable dans l’histoire quotidienne comme dans les fastes de la république, mêlés à tous les événemens de politique intérieure et extérieure, toujours représentés dans les députations qui vont saluer le roi, les dauphines, les commandans d’armée. Le duc Philippe-Ferdinand de Schleswig-Holstein conférera en 1776 à l’un d’eux le titre de Volckersberg, en considération des charges remplies à Mulhouse par ses ascendans, et de la qualité de patricien d’une ville libre équivalente à la noblesse de l’Empire. Le peintre Jean-Henri, auquel s’adressait Schmalzer, était justement le chef de la branche dite de la Cour de Lorraine : il accepta les propositions de son concitoyen.

Les fonds, Schmalzer les demanda à Samuel Kœchlin, rentier et négociant. Un ancien portrait nous garde les traits inoubliables du père de ce Samuel, appelé lui aussi Samuel. Coiffée d’un bonnet en velours broché, la tête est durement découpée, comme dans du bois, avec un menton osseux, des joues creuses, une grande bouche ; les épaules sont couvertes d’un manteau de velours, les yeux expriment une volonté impérieuse et pleine d’orgueil : on dirait un vieux chef de tribu orientale. Et c’est bien un chef en effet, le chef de cette dynastie des Kœchlin, dont les descendans atteignaient en 1881