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de ses réformes ; il avait, surtout, confiance dans la justice de l’avenir, qui refrénerait les passions de la lutte. « Vous le voyez, concluait-il, je n’appartiens pas à la catégorie des pessimistes ; mais assurément, les idées des pessimistes se vérifieront, si ceux qui sont qualifiés pour agir mettent les mains dans leurs poches. Puisse-t-il n’en pas être ainsi ! »

Falk insistait, en passant, sur l’importance des élections qui devaient bientôt renouveler le Landtag : on pouvait se demander s’il voulait faire condamner par le peuple prussien son successeur Puttkamer, les prédicateurs de la Cour, et la politique personnelle du roi Guillaume, et si le ministre de la veille voulait susciter contre le ministre du jour la formation d’une future majorité. Bismarck, apparemment, fut choqué de cette démarche, car les Grenzboten, qu’il inspirait, la déclarèrent incompatible avec les devoirs d’un ancien ministre. La lettre de Falk était d’un politicien. Dans ce royaume de Prusse où l’on était habitué de considérer les membres du Cabinet comme de très hauts chefs de bureau, l’anomalie même de cet appel électoral le rendit à peu près inutile : il avait, si l’on ose dire, trop de portée, pour obtenir une immédiate efficacité. On peut supposer que Guillaume le jugea sévèrement, et que les antipathies de la Cour contre les nationaux-libéraux furent fortifiées.

Le Centre observait ces intéressans incidens, qui finalement lui devaient profiter. Il constatait que pour l’instant les pétitions scolaires des catholiques n’étaient pas mieux accueillies par Puttkamer que par Falk : une fois de plus le clergé de Munster avait demandé qu’avant d’enseigner le catéchisme l’instituteur en reçût de l’Eglise la mission ; une fois de plus, la Prusse officielle évinçait la requête, sans que Windthorst en fût très surpris. Mais les élections étaient proches : Windthorst songeait, d’abord, à ramener ses troupes, fraîches et fortes, dans le nouveau landtag : on discuterait ensuite avec Puttkamer et Bismarck. La campagne électorale qu’engagea le Centre fut surtout une campagne d’explications : elle visait d’une part à faire excuser par les catholiques l’appui récent qu’avait prêté à Bismarck le Centre du Reichstag, et d’autre part à leur faire comprendre combien était nécessaire, quand même, le maintien des protestations incessantes, des revendications continues. Les orateurs du Centre promenèrent à travers la Prusse rhénane de véritables conférences d’éducation publique ; ils surent présenter à