Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 8.djvu/544

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des foules une politique qui commençait d’être une politique nuancée. Tout au fond d’eux-mêmes, l’ancien officier de tendance conservatrice qu’était Schorlemer-Alst et le tribun particulariste qu’avait été Windthorst se sentaient assurément séparés par certaines divergences, portant sur des points de détail, ou sur des questions d’opportunité, et c’était toujours un paradoxe, pour les spectateurs mal informés, de voir collaborer avec des aristocrates de haute lignée des plébéiens fiers de leur roture, comme le boucher Falk, de Mayence, très considéré dans les congrès catholiques, et qui se flattait un jour, publiquement, d’avoir, lui aussi, tout comme Bismarck, travaillé vingt années durant « avec le fer et dans le sang, » Mais en présence des foules toutes divergences se voilaient ; alors l’unité des chefs catholiques s’épanouissait, leur cohésion n’était entamée par aucune fissure.

Une revue d’ensemble suivit ces mobilisations partielles : elle eut lieu à Aix-la-Chapelle, dans l’assemblée générale des catholiques. Windthorst, qui jusque-là n’avait pas assisté à ces meetings annuels du catholicisme germanique, se rendit à celui-là, en compagnie de Franckenstein : l’année 1879 marquait ainsi une sorte de tournant dans l’histoire des grandes assemblées catholiques allemandes : les parlementaires, les hommes de négociation, belliqueux ou pacifiques suivant les heures, allaient y prendre une place prépondérante, et devant eux s’effaceraient, dociles, les militans de l’action locale, voués à l’opposition systématique par le fait même de leurs souffrances et des incessantes vexations gouvernementales. Il y eut même, dans le comité d’organisation du congrès d’Aix-la-Chapelle, une minorité déjà notable, pour souhaiter que le buste de l’Empereur figurât, sur l’estrade, à côté du buste du Pape. Les temps n’étaient pas encore mûrs pour une aussi symbolique exhibition ; mais les temps mûrissaient, puisque déjà l’on y pensait. « Le mot d’ordre, signifiait Auguste Reichensperger, c’est de prier et de travailler. Tranquilles et d’avance soumis nous laisserons à la sagesse de notre Saint-Père le soin de concerter la paix. »

La Prusse, le 8 octobre, sous l’impression de la lettre de Falk et du congrès d’Aix-la-Chapelle, vota pour renouveler son Landtag : elle infligea aux nationaux-libéraux la plus éclatante des disgrâces. Ils étaient sortis 168, ils rentrèrent 105. Les conservateurs, qui naguère ne disposaient que de 42 voix, arrivaient en rangs serrés : à l’appel, ils étaient 150. Le Centre