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V

Bismarck, en mars, puis en mai, avait conversé avec Windthorst ; de septembre à décembre, il avait conversé, puis fait converser, avec Jacobini ; les pessimistes pouvaient dire, au début de 1880, que causer inutilement est parfois plus grave que de n’avoir pas causé du tout. Et cependant, en dépit des hésitations et des accrocs, il y avait en Prusse quelque chose de nouveau. L’État cherchait désormais, non plus à prendre les curés en faute, mais au contraire à fermer les yeux : Puttkamer, le 20 janvier 1880, stipula que les policiers qui constateraient certains actes de culte tombant sous le coup de la loi devraient, non pas les déférer aux parquets, mais informer le président supérieur, qui jugerait s’il y avait lieu de poursuivre ; il prescrivit, par surcroît, que le président supérieur, jusqu’à nouvel avis, s’abstînt de prononcer contre des prêtres la peine de l’interdiction de séjour. Puttkamer ne pouvait pas faire que les cruelles lois de Mai n’existassent ; mais il laissait voir à ses subordonnés que le prestige de ces lois subissait une éclipse.

Le Centre, en février, lui demandait, au Landtag, pourquoi elles duraient, et jusques à quand. Il rappela, dans sa réponse, que les empiétemens de l’Eglise, intolérables, disait-il, pour un Etat dont les origines ne sont pas catholiques, avaient en partie motivé ces lois ; il exprima son espoir d’un arrangement, qui ne pourrait se faire, d’ailleurs, que sur le terrain des lois, et signifia que les membres du Centre, s’ils persistaient à vouloir appliquer, vis-à-vis de l’Etat, certaines de leurs maximes, étaient condamnés à être éternellement dans la minorité. Ils lui pardonnèrent à peu près ce pronostic, heureux de l’entendre dire : « Que l’Eglise catholique soit une institution parfaitement digne du respect de (ses fidèles et de l’estime des hommes du dehors, jamais un chrétien évangélique n’en doutera. » De pareils propos étaient rares sur les lèvres des ministres prussiens. Agacé par Puttkamer, houspillé dans un discours de Schorlemer-Alst, Falk se leva, se défendit d’avoir fait, dans le Culturkampf, une œuvre négative et destructrice, affirma que la victoire resterait à ses idées.

Quelques jours se passaient, et le mercredi des Cendres, un discours de Puttkamer donnait un nouveau coup de bélier dans