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Dans le seul mois d’août 1777, furent supprimés et remboursés quatre cent dix-sept offices et charges inutiles, contrôleurs des domaines, gardes généraux des eaux et forêts, et autres emplois du même genre. Dans le même temps, le directeur pratiquait une coupe salutaire dans la haute administration des postes. Ils étaient dix qui touchaient annuellement chacun une centaine de mille livres[1] ; Necker institua une régie ; la même besogne fut faite par six commis, aux appointemens de vingt-quatre mille livres.

Un arrêté qui fit un moment quelque bruit est celui qui réglementa l’administration supérieure de la Loterie royale. Clugny, comme on l’a vu, avait érigé la loterie en institution permanente, régie par des agens spéciaux, au nombre d’une douzaine, sous la haute direction du contrôleur général des Finances. Necker, malgré ses répugnances, ne crut pas pouvoir renoncer, dans l’état actuel du Trésor, à un système qui procurait des ressources considérables[2], mais il réduisit de moitié le comité des administrateurs et s’y prit d’une manière assez originale. Il assembla les douze intéressés, leur déclara son intention et les mit en demeure de procéder eux-mêmes au sacrifice, en désignant les victimes à ses coups. Voici, rapportent les gazettes, le langage qu’il leur tint : « Messieurs, le Roi a trouvé des abus dans votre gestion. Je n’en accuse personne ; mais le Roi pense que vous êtes trop de moitié. Il faut donc réformer six d’entre vous. Je ne crois pouvoir mieux faire que de laisser à votre choix ceux qui sont à conserver. Voici du papier et de l’encre. Que chacun de vous donne son suffrage aux six qu’il croira les plus propres à remplir ces fonctions[3]. » Bon gré mal gré, il fallut en passer par là L’Etat gagna à cette exécution l’économie annuelle d’une bonne soixantaine de mille livres.


III

Les doléances, les « criailleries, » excitées par de telles mesures dans le monde financier, étaient, cependant, peu de

  1. Lettre de Mme du Deffand à Walpole, du 23 août 1T77. (Correspondance générale publiée par Lescure.)
  2. La Loterie royale subsista jusqu’en 1793.
  3. Correspondance secrète de Métra, 30 juillet 1777. — Mémoires de Soulavie, etc., etc.