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été, d’une façon plus ou moins précise, le secret désir des Allemands, c’est ce que montre cette phase des négociations de l’été dernier où ils nous proposèrent une sorte de partage économique du Maroc. En résumé, et sans nous engager dans une discussion approfondie de la déclaration du 8 février, très fortement défendue par M. Pichon à la tribune du Sénat et très justement appréciée par M. Baudin, dans son rapport, il résulte de l’examen des faits et de tout ce qui a été dit, qu’il y a eu quelque lenteur dans la conclusion de l’accord financier avec le Maroc qui ne fut signé qu’en mars 1911, et surtout dans l’organisation de la mission militaire grâce à laquelle l’expédition de Fez aurait peut-être pu être évitée. Il reste que l’accord a été une étape nécessaire vers le Protectorat et qu’il a eu ce résultat très important de décourager les résistances locales en prouvant « au Sultan et aux chefs des tribus qu’ils n’avaient plus rien à espérer de l’antagonisme franco-allemand. »

Nous touchons maintenant aux origines proches de l’incident d’Agadir et du traité du 4 novembre 1911. La politique des associations d’intérêts entre la France et l’Allemagne, tant au Maroc qu’au Congo, recelait certaines contradictions qui n’étaient pas irréductibles, mais qui en rendaient l’application difficile ; cependant, la cause principale de son échec, c’est dans des raisons de politique intérieure qu’il la faut chercher. La commission du budget de 1910 a assumé, de ce chef, une lourde responsabilité en faisant échouer le consortium de la Ngoko-Sangha. L’échec, en quelques semaines, de tous les projets de collaboration économique franco-allemande (Ngoko-Sangha, chemin de fer Congo-Cameroun, chemins de fer marocains, chemin de fer en Asie Mineure) produisit naturellement une mauvaise impression à Berlin. L’expédition de Fez mit le comble à l’impatience du Cabinet de Berlin et à la nervosité de l’opinion. Comme en 1904, après l’accord franco-anglais, l’Allemagne ne fit pas d’objection précise à l’expédition de Fez, mais elle formula des réserves et s’apprêta à formuler des exigences. Dans le pays, les passions