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n’eût tenu qu’à Ducrot, en poursuivant son avantage, de commencer la bataille par l’anéantissement de la droite allemande. Au contraire, sur la gauche, les Prussiens, embusqués dans les vignes de Gunstett, firent subir en peu de temps de graves pertes à notre bataillon de chasseurs et à notre compagnie de zouaves.

Le centre, qui avait allumé l’incendie à droite et à gauche, allait-il persister dans l’immobilité à laquelle Walther l’avait ramené après avoir accompli sa reconnaissance ? Le colonel von der Erch, chef de l’état-major du Ve corps, accouru aux avant-postes, attentif à la lutte entre Ducrot et les Bavarois, entre Lartigue et Bose, ne crut pas pouvoir rester inactif tandis qu’on se battait aux ailes. Animé du démon de l’offensive, il prend une initiative hardie, et, quoiqu’il fût entendu que ce jour-là il ne devait pas y avoir de bataille, il ordonne au Ve corps de s’engager. Son initiative est approuvée, d’abord par le commandant de la Xe division Schmidt et bientôt par le chef du corps, Kirchbach, accouru malgré sa récente blessure. Les troupes prennent leur formation de combat.

Ainsi la bataille s’était engagée à la droite et à la gauche allemandes parce que le signal en était parti du centre, et elle reprenait au centre, malgré la volonté des chefs de l’arrêter, parce qu’elle continuait à droite et à gauche. Dès lors, le feu crépite ou gronde tout le long de la Sauer, de Langensoultzbach à Gunstett. Et voilà comment, personne ne voulant se battre le 6 août, tout le monde est entraîné : à notre centre, Raoult contre Kirchbach ; à notre gauche, Ducrot contre Hartmann ; à notre droite, Lartigue contre Bose.


III

Au centre, Kirchbach pousse vivement son action : 84 bouches à feu sont postées des deux côtés de la route de Dieffenbach à Wœrth, se reliant aux 24 pièces de l’artillerie de la XXIe division ; de Gœrsdorff à Gunstett, 108 pièces se concentrent sur une ligne enveloppante, et de neuf heures et demie, avec une intensité croissante jusqu’à dix heures et demie, elles font converger leurs feux sur notre position. Mac Mahon leur oppose 48 bouches à feu de 4, qui, réparties sur notre front, la ligne enveloppée, ne peuvent fournir que des feux divergens. Les obus allemands