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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 8.djvu/913

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se payer sur les collections. La « Notice, éditée par leurs soins, des peintures à la gouache, à l’aquarelle et au transparent, par feu Carmontelle dont la vente s’en fera au plus offrant et dernier enchérisseur, le 17 avril 1807 à onze heures du matin rue Vivienne, 22 » mentionne avec d’habiles éloges, un « recueil de 750 portraits de princes et seigneurs, de princesses et dames titrées, de ministres, guerriers, magistrats, ecclésiastiques, sa vans et personnages illustres sous le règne de Louis XV coloriés à la gouache d’après nature. »

Hugues-Adrien Joly, « garde » des estampes à la Bibliothèque impériale, en reçut un exemplaire. Il intervint auprès du ministre, sollicitant un crédit qui permît d’acquérir un lot si curieux. Mais le pauvre homme mourut sur ces entrefaites, Champagny avait d’autres soucis en tête et nulle suite ne fut plus accordée à l’importune requête.

Dans cette extrémité, Lédans prit un parti héroïque. Il rassembla ses derniers écus, emprunta quelque argent à des amis, paya les dettes de la succession et put ainsi racheter à l’amiable les cartons qu’il convoitait.

Les dessins en sa possession, il s’occupa d’en dresser le catalogue. Carmontelle, durant ses derniers jours, les avait lui-même rangés dans treize cahiers, par ordre chronologique. Son héritier respecta cette classification. De sa fine et peu lisible écriture, il inscrivit sous chaque portrait le nom de l’original, l’accompagnant sur le manuscrit explicatif, actuellement conservé aux archives de Chantilly, d’un commentaire lestement troussé. Pour les avoir fréquentés beaucoup, il connaissait bien ses personnages et son exactitude paraît sincère, jusque dans les détails les plus gaillards.

Par la suite, cependant, sa pauvreté l’obligea d’aliéner certaines pièces de la collection « à ceux des membres de l’ancienne bonne compagnie, dit-il avec une préciosité sentimentale, qui avaient l’âme assez ouverte aux douces réminiscences de l’amitié ou de la parenté. Une quinzaine de personnes vinrent ainsi chercher qui son grand-père, qui son oncle et qui sa douce amie. »

A sa mort, en 1816, les portefeuilles, contenant.’)30 dessins donnant 635 portraits, devinrent la propriété de La Mésangère : le directeur du célèbre Journal des Dames et des Modes fit monter les passe-partout qui les encadrent encore à présent.