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aux nôtres, 223 officiers, 4 648 hommes tués, blessés ou disparus. Nous eûmes tués, blessés, disparus, 249 officiers, 3 829 hommes dont la moitié au moins appartenait à la division Laveaucoupet. Notez que nous manquions de tout, selon Messieurs les Doctrinaires, que la pénurie était générale : qu’aurait-ce été si nous avions eu quelque chose ? Nous les aurions tous exterminés.


VII

Mac Mahon n’avait accusé personne, pas même Failly, de sa défaite. Il en avait accepté silencieusement l’entière responsabilité. Frossard essaya de couvrir sa nullité en accusant Bazaine de ne l’avoir pas secouru à temps et d’avoir été ainsi le véritable auteur de sa défaite. « Le combat de Forbach était tout à notre avantage jusqu’à quatre heures du soir après huit heures de lutte. Si à ce moment, où j’avais engagé toutes mes réserves, les renforts demandés par moi dès le matin au maréchal étaient arrivés, comme ils auraient pu le faire, je l’affirme, nous aurions remporté un avantage magnifique par ses résultats au lieu de l’échec que nous avons subi. » Ce thème a prévalu, et il est devenu de tradition presque courante de considérer Bazaine comme le véritable vaincu de la journée.

L’examen impartial des faits détruit cette légende. D’abord, c’est à une heure seulement que Frossard a annoncé à Bazaine ; le commencement de la bataille de Forbach : il n’avait donc pu demander des renforts dès le matin ; lorsque à cinq heures il en réclama formellement, Bazaine répondit sur-le-champ à ses demandes, n’y apportant d’autre retard que le temps nécessaire à lire une dépêche, regarder une carte, réfléchir, rédiger, expédier un ordre. Il met successivement à sa disposition toutes ses divisions, sauf celle de Decaen. Ces divisions auraient pu arriver plus vite si elles avaient été échelonnées les unes derrière les autres, sur la communication directe de Saint-Avold avec Forbach ; mais ce n’est pas Bazaine qui les avait étendues sur un large espace. La lenteur avec laquelle Montaudon a exécuté sa marche ne peut, pas plus que le va-et-vient de Castagny, lui être imputée. Enfin pouvait-il prévoir que, affolé, Frossard non vaincu se constituerait lui-même à l’état de défaite et se replierait,