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furent envoyées à l’intérieur et des agens entrèrent en relations avec les chefs et les marabouts influens, préparant le terrain pour une prochaine enquête. Le Banco di Roma porta son capital à 80 millions et il vient, récemment encore, de l’accroître. Malgré ces efforts, le commerce restait stagnant, les affaires ne se développaient pas ; les capitaux demeuraient improductifs ; le passif grossissait. Les fonctionnaires ottomans entravaient, par toute sorte de tracasseries, l’essor économique de la province et particulièrement des entreprises italiennes : à Benghazi, par exemple, l’usine électrique, construite pour éclairer la ville, ne fut pas autorisée à fonctionner. Le Banco di Roma, ayant engagé de gros capitaux en Afrique, dans l’intérêt et presque sur les indications du gouvernement, avec l’assurance qu’un jour ou l’autre la Tripolitaine et la Cyrénaïque passeraient sous la domination de l’Italie, et qu’à la longue, l’attente des actionnaires serait récompensée, se trouva, dit-on, dans une situation difficile. L’année dernière, son directeur fit savoir au gouvernement qu’il allait se trouver dans la nécessité de liquider ses affaires de Tripolitaine et qu’il se disposait à entrer en pourparlers avec un groupe anglais et un groupe allemand. Cette perspective menaçante contribua beaucoup, semble-t-il, à décider le gouvernement à intervenir, au besoin par les armes. Les hostilités commencées, le Banco di Roma recul l’entreprise du ravitaillement en vivres, en vêtemens, harnachemens, etc., du corps expéditionnaire. Il reste l’associé du gouvernement pour le développement des intérêts italiens en Tripolitaine ; il fut même un moment question de lui confier le service de la Trésorerie dans les pays conquis, mais la Banque d’Italie protesta par une circulaire où elle rappelait qu’elle avait été associée à toute l’histoire de l’unité italienne et qu’elle pensait avoir quelque droit à n’être pas exclue des bénéfices de la nouvelle expansion de la monarchie dans la Méditerranée.

La Banque qui a la confiance du Vatican se trouve donc être, en même temps, celle qui, la première, a cherché à promouvoir les entreprises italiennes en Tripolitaine : élégante combinazione qui rapproche, pour une œuvre d’expansion italienne et de rayonnement chrétien, les deux pouvoirs historiques qui, à Rome, s’ignorent officiellement et se combattent. Dans les milieux catholiques, la guerre contre les Turcs a été très populaire ; éloignés des élections et de la vie politique par les directions