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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 9.djvu/622

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l’argent laisse par les touristes étrangers (environ 900 millions par an), compensent le tribut que l’Italie, malgré son labeur opiniâtre et la prospérité croissante de son économie nationale, paye à la production étrangère[1]. Le change qui, en 1893, dépassa 117 pour 100, était revenu au pair. La période difficile qui a suivi la crise américaine de 1907-1908 a retardé les progrès de l’industrie, elle ne les a pas arrêtés ; l’essor est rapide surtout dans la région où les torrens des Alpes fournissent la houille blanche. Non seulement les impôts donnent des plus-values, mais, dans l’ensemble, les particuliers sont devenus plus riches. Les titres de la Dette (13 milliards et demi) qui, naguère encore, étaient placés presque tous à l’étranger, sont peu à peu rachetés en Italie ; les cours, malgré la guerre, restent assez fermes et la conversion automatique, qui va se faire au 1er juillet 1912, transformera le 3 3/4 en 3 1/2 pour 100. Enfin un trésor de guerre avait été constitué et renfermait, dit-on, deux cents millions.

La crise franco-allemande de 1905, en attirant l’attention sur l’état de l’armée italienne, avait montré qu’elle n’était pas prête à faire campagne. De 1907 à 1910, d’après les rapports de la Commission d’enquête parlementaire, constituée sous les auspices de M. Giolitti, des réformes furent réalisées. Malgré l’adoption récente du service de deux ans et la réorganisation encore inachevée de l’artillerie, on peut dire qu’en 1911 l’état matériel et moral de l’armée italienne était devenu satisfaisant. Pendant la crise européenne de 1908-1909, provoquée par l’annexion de la Bosnie, l’état-major italien prépara une mobilisation dirigée vers les frontières de Trieste et du Trentin. Enfin, en ces derniers mois, on étudia et on prépara secrètement une expédition en Tripolitaine. Tout était au point, armée et flotte, quand les circonstances décidèrent M. Giolitti et le Roi à une action immédiate.

Ces grands progrès, cette prospérité matérielle croissante, ces forces imposantes sur terre et sur mer, furent le voile brillant mais trompeur qui dissimula à l’Italie les difficultés et les périls

  1. Année 1909 : ¬¬¬
    Importations Exportations
    3 079 113 lires 1 833 723 lires

    Voyez Edouard Payen, la Situation économique et financière de L’Italie, dans les Questions diplomatiques et coloniales du 1er octobre 1911.