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et désapprennent dès lors, dans une certaine mesure, ce qu’il leur avait appris. Il y a là un inconvénient reconnu, contre lequel il importe de se pourvoir en poussant le plus loin possible l’instruction de la compagnie isolée et, — puisque cette première limite est vite atteinte, par manque d’effectif, — en unifiant le plus possible la progression et la manière de cette instruction, sous le contrôle du chef de bataillon. Celui-ci devient ainsi le pivot autour duquel tout gravite, ou, pour mieux dire, le moteur unique d’où partent l’impulsion du travail et l’entrain du commandement.

Nos derniers règlemens définissent justement dans ces termes le rôle de cet officier supérieur ; ils le grandissent à proportion dans le domaine du service intérieur. Mais pour que son autorité, devenue plus active, ne s’exerce pas au détriment de celle des capitaines, il importe que ceux-ci aient eux-mêmes un commandement à leur taille, un domaine où ils soient maîtres, une place au soleil dont personne ne puisse les déposséder. La compagnie de 115 hommes, si légère qu’elle soit dans la main, pèse assez sur la conscience pour qu’ils puissent encore se satisfaire de la commander ; mais elle est le strict et dernier minimum au-dessous duquel la force de l’unité élémentaire ne doit pas descendre.

Si l’on recherche, en effet, par quels chiffres la compagnie française a passé au cours de l’histoire, on s’aperçoit que les périodes de déclin militaire ont seules connu des effectifs plus bas. Très variable sous l’ancien régime et toujours inférieure, quoi qu’on fit, aux fixations royales, la compagnie de fusiliers fut définitivement relevée à 116 hommes, cadres non compris, par le ministre réformateur Saint-Germain (ordonnance du 25 mars 1776). On la trouve de 152 hommes, sous le Directoire (14 Messidor an VII), de 121 hommes, à la fin de l’Empire (18 février 1808). Elle retombe à 78 hommes, au début de la Restauration (ordonnance du 24 octobre 1820) pour repasser à 90 hommes quelques années plus tard (27 février 1825). Sous la monarchie de Juillet, puis, sous le second Empire, elle s’écarte peu de ce niveau bas : ce fait seul prouve combien nous étions loin alors de l’intensité d’armement à laquelle nous parvenons aujourd’hui. Sous la troisième République même, la loi du 13 mars 1875 ne la fixe d’abord qu’à 82 hommes de troupe, mais l’insuffisance de cette dotation est vite reconnue ; aussi la