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port ne produiront pas une économie de plus de 3 à 4 francs par tonne. La productivité des sommes employées en chemins de fer est donc au moins triple de celles employées en travaux de ports, tant du moins qu’un réseau étendu de voies ferrées n’est pas constitué.

Il n’en résulte certes pas que l’on ne doive améliorer les très insuffisans ports marocains ; mais, outre qu’il ne faut pas disperser les crédits sur toute la côte, on ne doit pas se proposer, d’ici à longtemps, d’y faire des ports sur le modèle de ceux même secondaires d’Europe. D’après la notice officieuse que nous avons déjà citée sur Casablanca, une dépense de 1 million a été faite en 1911, une autre de même somme est en train de se faire en 1912 et une troisième de 1 million également est prévue pour 1913 au port de Casablanca. Qu’on aille pour ce port jusqu’à la demi-douzaine de millions et, pour tout le Maroc, jusqu’à 20 ou 25 millions, cela doit suffire pour une dizaine d’années. Le moyen de développer ces travaux davantage, ce serait de les gager sur des droits de tonnage qui en payassent l’intérêt et l’amortissement ; alors la dotation pourrait être plus élevée.

Que sera la colonisation au Maroc ? A l’heure actuelle, ce pays séduit les imaginations ; on s’y précipite ; on a parlé d’une ruée sur le Maroc ou d’un run marocain. Financiers, capitalistes amateurs, contremaîtres, ouvriers y affluent : beaucoup sont obligés de se rembarquer après avoir épuisé vainement de maigres ressources. Au point de vue agricole, le Maroc est très séduisant sur la façade de l’Atlantique et sur une largeur d’une centaine de kilomètres, également du côté d’Oudjda. Mais les terres vacantes n’abondent pas. D’après la notice consulaire de Casablanca, datée de février 1912, le prix moyen de l’hectare de terre qui, six mois auparavant, oscillait de 30 à 80 francs, est monté entre 70 et 200 francs ; aux environs mêmes de Casablanca, dans un rayon de 50 kilomètres, il atteindrait 300 francs. D’après la notice sur Tanger, « le prix d’achat du terrain dans la banlieue de cette ville est très élevé (au moins 1 000 francs l’hectare), les indigènes ne faisant aucune différence entre les terrains à bâtir et la terre de culture. »

Le Maroc n’offrant aucune faveur douanière aux produits français, il en résulte, par réciprocité, que les produits marocains ne pourront prétendre à aucune faveur en France et qu’ils y