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propos injurieux et nuisibles à la réputation de cette fille. Donc, il venait, — et, probablement, amené par la fille, — rendre hommage à la vérité. Ces propos, il les déclarait, avec une sorte de spontanéité, calomnieux et faux ; et Léonarde, fille d’honneur et de conduite, fille de vertu. « Et, pour le rétablissement de la paix et l’union entre les parties, nous, juge de paix, avons reçu ladite déclaration, dont Léonarde Bray nous a précédemment déclaré être contente et satisfaite ; et il est convenu que la minute de cette déclaration, écrite par nous et souscrite par Pierre Marfonds, demeureroit en dépôt dans notre greffe, pour expédition en être faite aux requérans en tous temps et en cas de besoin. »

Cette Léonarde, nous la retrouverons : c’est une gaillarde. Et un gaillard, ce Marfonds, que nous retrouverons également, toujours en querelle avec Léonarde. Leur bisbille commence au mois de mars 1791. Et Joubert leur a dit de bonnes paroles, qui ont disposé Léonarde à la mansuétude, Marfonds à la courtoisie. Il a dépensé, en leur faveur, la plus ingénieuse dialectique ; il croit les avoir accordés et il se félicite d’avoir été, dans sa petite ville, un artisan de bonne entente.

Il a d’autres soucis. Dès le début de 1790, les Montignacois ont créé une « Société populaire » dont les grands hommes sont Desmonds, homme de loi, qui devint procureur de la commune ; Mérilhou, qui devint maire, et son frère qui, après Joubert, sera juge de paix ; un Requier, parent de Joubert ; un Granger, qui devint l’un de ses assesseurs ; et surtout Élie Lacoste, le médecin, l’un des meneurs de l’opinion montignacoise. C’est lui qui a rédigé le cahier des doléances de la commune. Nous l’avons vu ennemi de La Bermondie et, sans doute, mêlé avec Boyer à l’élection de Joubert. Il prétend écrire « avec le crayon mâle de la vérité. » En 1789 déjà, il est monté en chaire, à l’église Saint-Pierre et il a tenu des propos enflammés. Il sera député à la Législative, conventionnel et votera la mort de Louis XVI. Il dénoncera Saint-Just comme fauteur de division. Emprisonné après l’insurrection de Prairial, il recouvrera la liberté par l’amnistie de l’an IV et alors, assagi, reviendra dans son pays pour y être de nouveau médecin.

La Société populaire de Montignac est plus bavarde qu’agissante : c’est, en somme, les habitués du pont qui ont pris un titre, choisi une salle de palabres et qui font de la politique,