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chacun des cas ; mais il est trop certain qu’il y a un péril vrai et grave derrière ces exemples.

Cependant cette situation met en gaieté un certain nombre de nos administrateurs. Le sous-préfet de Clermont, dans l’Oise, reçoit une délégation des habitans de Cinqueux navrés de la destruction de leur clocher par la dynamite. Il leur dit : « De quoi vous plaignez-vous ? Je vous ai fait des ruines superbes. Les étrangers vont venir les visiter. Mettez devant un tourniquet, et faites payer vingt sous d’entrée ; cela vous fera de l’argent. » (Exclamations à droite.)

Voilà comment des gens que nous payons tournent en dérision des sentimens que nous respectons. (Très bien ! Très bien ! à droite et au centre.)

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL. — Mais le fait est-il exact ?

M. MAURICE BARRÈS. — Messieurs, je demande au gouvernement et je demande à la Chambre : Prenez-vous votre parti de ces destructions ?

M. LE PRÉSIDENT DU CONSEIL. — Eh bien ! oui. Le clocher dont il s’agissait...

M. MAURICE BARRÈS. — Je vous vois venir. Ne déplaçons pas la question. Je sais à quel monstre de souplesse j’ai affaire. (On rit.) En rappelant la demande des catholiques de Cinqueux, j’ai voulu démontrer que le sérieux, le pathétique de cette question des églises, qui échappe à un certain nombre de nos collègues, échappe également à certains de vos administrateurs. Quand une démarche est faite auprès d’un fonctionnaire par des contribuables, — j’emploie le mot « contribuable » dans l’idée qu’il aura ici plus de poids que le mot de « fidèle, » — acceptez-vous que ce fonctionnaire les nargue ? Ah ! vous voudriez me parler du fond de la question ! Non, je cite le cas de Cinqueux uniquement pour vous prouver l’état d’esprit d’une partie de l’administration et l’irrespect d’un jeune fonctionnaire à l’égard de ce qui est vénérable. (Applaudissemens à droite.)

Voilà des faits. J’en pourrais citer jusqu’à demain. Voilà quelques-uns des mille épisodes du grand fait général qui est voulu et préparé par plusieurs : la démolition de nos églises. Je devais mettre ces cas exemplaires sous les yeux de la Chambre pour justifier les considérations d’ordre moral qui vont faire l’objet de la seconde partie de mon discours.

Je viens vous demander, monsieur le Président du Conseil ;