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dont le seul but serait de défendre les intérêts de leur culte et de leur loi. » (Nouveaux applaudissemens sur les mêmes bancs.)

Briand prit la parole. Il fit son métier de ministre. Je veux dire qu’il se préoccupa de durer, et par conséquent adopta le ton du plus grand nombre. Pourtant, ce ton, en le faisant sien, il l’atténua. Et, si j’ose cette comparaison, il se tenait à l’arrière de son bord en ouvrant ses tonneaux d’huile.

Il faut croire que, durant la nuit, ses préfets lui avaient confirmé l’exactitude de mes renseignemens, car il ne put infirmer aucun des faits que j’avais apportés à la tribune ; seulement il refusa d’y voir de simples exemples choisis entre mille autres, A l’en croire, le bon apôtre, c’était là tout ce que j’avais pu trouver d’églises en péril. Il en prit occasion pour monter au Capitole et se féliciter des conditions heureuses dans lesquelles s’établissait le nouveau régime des cultes. S’il y avait un problème des églises, la faute en était aux seuls catholiques. Il en rougissait pour eux. « Il faut bien le dire, monsieur Barrès, c’est en somme un débat assez pénible pour les catholiques que vous avez institué aujourd’hui. Ces humbles églises de village ont une valeur de sentiment, incitent à des préoccupations tout à fait légitimes. Mais cette valeur d’affection particulière et profonde, tout ce qu’invoquent leurs vieux murs, comme vous le disiez si éloquemment, est relatif à des sentimens intérieurs des catholiques. C’est ceux-ci qui sont les premiers intéressés à cet égard et dont le zèle devrait s’employer à maintenir ces instrumens et ces témoins de leur foi. C’est parmi les catholiques qu’un grand mouvement irrésistible devrait se produire dans un tel but. Il est assez attristant pour eux que ce soit toujours vers l’État que les citoyens, même dans des cas comme celui qui nous préoccupe, se tournent, après les luttes que nous savons, les refus que nous connaissons, les concessions successives du gouvernement de la République. Adressez-vous, avec votre éloquence, avec l’élévation de votre pensée, adressez-vous à ces catholiques chez lesquels vos paroles auront certainement un écho, et vous n’aurez pas à redouter, monsieur Barrès, la destruction des églises. »

Et précisant sa pensée, il invitait les catholiques à se concerter, à constituer des associations selon la loi de 1901 pour l’entretien des édifices cultuels, à recueillir des cotisations et à employer la procédure des offres de concours.