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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/381

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Philippeaux, on eût communication des pièces et, par ailleurs, prêchant la réconciliation des patriotes : «. Sacrifions nos débats particuliers, conclut-il, et ne voyons que la chose publique. »

Philippeaux, s’étant retiré du club, porta la querelle devant la Convention, le 18, sans que Danton intervînt. Mais, aux Jacobins, Robespierre donna le coup de grâce à l’auteur des mémoires et le fit chasser. Il se contenta pour le moment de cette vengeance, n’entendant point procurer une éclatante victoire aux Hébertistes. Ne suffisait-il pas qu’un des amis de Danton eût été proclamé indigne par les Jacobins, et qu’il fût, en passant, démontré que Danton protégeait assez mal ses amis ?

De fait, que Danton eût agi par modération ou par prudence, la disgrâce de Philippeaux le laissait affaibli. En attendant qu’il montât, en germinal, sur la même charrette que lui, il partageait, dans une certaine mesure, sa disgrâce et elle n’était pas consommée que celle de Fabre, autrement grave, atteignait cette fois le tribun en pleine poitrine.


C’était, ce Fabre, le plus ancien de ses amis politiques : du district des Cordeliers à la Chancellerie, des bancs du Club à ceux de la Convention, toujours Fabre avait été le bras droit de Danton. Le compromettre en une fâcheuse affaire était le rêve des ennemis du tribun. S’il était démontré que le bras était gangrené, comment admettre que le corps fût sain ?

L’homme prêtait le flanc. Il avait été le mauvais génie de Danton et, en même temps que le plus intime, le pire de ses amis. Il l’avait toujours poussé aux violences, aux désordres, aux gaspillages, aux massacres. Il avait, pendant son passage à la Chancellerie, tripoté plus qu’aucun des collaborateurs de Danton, et une affaire de fournitures de souliers à l’armée, encore mal connue, mais soupçonnée, le discréditait. Il avait une réputation détestable.

Robespierre haïssait de toute la sincérité de son puritanisme ce « voleur » que, par surcroît, il voyait depuis cinq ans aux côtés de Danton, le corrompant en le servant.

Dès l’abord, il avait, je l’ai dit, espéré l’englober dans l’affaire de la Compagnie des Indes. Chabot avait, à la vérité, gardé le pot-de-vin destiné à Fabre ; mais n’était-ce point assez