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Page:Revue des Deux Mondes - 1914 - tome 20.djvu/774

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le monde civilisé, par le succès retentissant de la première Exposition Universelle de Londres au Crystal Palace en 1851. Dans tous les milieux de labeur, chez les industriels, commerçans, artistes, ce fut comme la sonnerie imprévue d’un tocsin d’alarme. Si tous les voyageurs d’outre-mer s’accordaient à reconnaître la supériorité de la France encore visible dans les trois arts directeurs. Architecture, Peinture, Sculpture, malgré la concurrence déjà menaçante des nations étrangères, tous s’attristaient de constater, en même temps, notre décadence marquée dans tous les arts qui en dérivent, arts dédaignés, arts négligés par d’absurdes préjugés scolaires ou mondains, sous les noms d’arts mineurs, arts serviles, arts industriels ! Certains peuples que méprisait notre orgueil académique, notamment les Orientaux, avaient, dans leur simplicité, mieux conservé que nous cette culture simultanée de tous les arts qui avait été, pourtant, chez nous, comme ailleurs, la cause profonde de la prospérité et de l’expansion de nos arts au Moyen âge, à la Renaissance, aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Pour la peinture et la sculpture, sans doute, un premier avertissement nous avait été donné dès 1848, par l’Exposition libre, sans Jury, organisée au Palais des Tuileries, après la révolution de Février. Du pêle-mêle incohérent qui s’y était empilé, avaient jailli, chez les experts attentifs, de vives inquiétudes ou de nouvelles espérances pour l’avenir. Les réalistes, dès lors, faisaient front aux idéalistes, et la querelle des classiques et des romantiques se ravivait sous d’autres formes. D’un côté, les révolutionnaires, ou se croyant tels, ameutés par Courbet, s’imaginaient créer de toutes pièces un art nouveau par une copie servilement lourde et brutale de la réalité, dont ils empruntaient la technique aux naturalistes italiens, espagnols, hollandais du XVIIe siècle, Caravage, Velazquez, F. Hals, etc. D’un autre côté, la plupart des autres artistes, plus éclairés et plus réfléchis, cherchaient avec raison le salut dans la reprise et la rénovation, plus sincères, plus émues, plus libres, des vieilles traditions nationales. Ils s’efforçaient donc simplement, au contraire, de réformer et compléter l’enseignement des arts, à tous les degrés, public ou privé. Cette question des arts, dans les milieux cultivés, devenait, dès lors, un sujet fréquent de conversations, de discussions et d’études, presque une mode, et un engouement. Au Musée du Louvre, largement ouvert, savamment