supposions pas qu’un sujet purement politique nous ramènerait chez elle dès le lendemain. Il s’agissait cette fois de la protestation que le roi Joseph venait d’adresser aux Chambres, et que tous les journaux de Paris avaient reproduite.
Le roi habite Point Breeze, près de Philadelphie ; il s’y fait appeler le comte de Survilliers, du nom d’un petit village voisin de son ancienne propriété de Morfontaine. Dès que les événemens du mois de juillet lui ont été connus, il a cru devoir obéir sans retard aux volontés de son frère, exprimées dans la lettre de Sainte-Hélène rapportée par le général Bertrand, et faire valoir les droits du Roi de Rome dans les termes mêmes que l’Empereur avait dictés.
Napoléon II a été proclamé en 1815 par une Chambre légalement nommée et dissoute par les baïonnettes étrangères. Au contraire, Louis-Philippe a été porté au trône par un acte indirect et sans le consentement de la nation ; sa position est fausse ; son passé est ambigu. Le comte de Survilliers développe cette thèse dans des lettres adressées à Lafayette, au comte Thibaudeau, aux généraux Lamarque, Gérard, Jourdan, Belliard, Merlin, au duc de Padoue, au comte Roederer. Il a envoyé le général Lallemand en mission secrète à Vienne et à Parme, pour essayer d’amener à son opinion M. de Metternich et l’impératrice Marie-Louise. Enfin, une lettre de lui aux députés français a été reproduite par les journaux.
Madame Mère en écoute attentivement la lecture, que je lui fais de mon mieux. Elle pense que la distance où son fils aîné est de l’Europe affaiblit la portée de ce qu’il peut dire. Il fait allusion à tort aux sympathies de la Russie, de l’Autriche et de l’Angleterre pour la cause de Napoléon II. Il met mal à propos sa famille en opposition au gouvernement français. Le malheur des Bonaparte, ajoute-t-elle, est d’être dispersés, et par-là même divisés. Elle raisonne sur tout cela avec une force et une justesse extraordinaires.
Au sortir du palais Rinuccini, la Reine veut porter notre journal chez le cardinal Fesch, qui se dispense du conclave en raison de son grand âge et de sa mauvaise santé. Elle juge pour sa part que les seules espérances permises aujourd’hui au fils de Napoléon doivent avoir l’Italie pour objet et se rapporter à ce titre de roi de Rome dont il fut revêtu à sa naissance. Si l’unité italienne était possible et si Napoléon régnait sur cette