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Page:Revue des Deux Mondes - 1915 - tome 29.djvu/940

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intime de l’école allemande à tous ses degrés. De telle sorte que force nous est de croire M. Thomas Smith lorsqu’il nous affirme, — ou, pour mieux dire, nous prouve, — que nulle autre école ne pouvait être mieux faite que celle-là pour stimuler, au fond de l’âme allemande, les plus graves défauts naturels de la race, et notamment ceux de ces défauts qui ont valu déjà depuis un an, à nos agresseurs, la cruelle série de déboires que l’on sait. Car si l’auteur anglais a négligé de nous apprendre jusqu’à quel point il est vrai que c’est au maître d’école prussien qu’est revenu jadis le principal mérite de la victoire de Sadowa et de celle de Sedan, du moins nous montre-t-il assez clairement qu’une très grosse part de responsabilité ne saurait manquer de revenir à ce même maître d’école dans la préparation de l’inévitable défaite allemande de 1915, — ou de l’année prochaine.


Et quant aux griefs relevés par M. Thomas Smith contre ce personnage, comme aussi contre ces incarnations supérieures du maître d’école que sont le professeur de collège et le professeur d’université, un seul mot suffirait pour les résumer : qu’elles s’adressent à l’enfant, au collégien, ou à l’étudiant, toujours les méthodes pédagogiques allemandes tâchent (et réussissent) à les transformer en autant de machines. Infatigable à détruire chez eux les moindres germes de spontanéité intellectuelle ou morale, tandis que d’autre part il ne néglige rien pour y développer le penchant inné qui, de siècle en siècle, pousse toute âme allemande à l’obéissance, toujours et par tous les moyens le maître d’école de là-bas poursuit la réalisation de son unique objet, qui consiste à fournir de rouages souples et dociles un immense appareil collectif, — la fameuse « organisation » de l’Empire allemand.

C’est assez dire que, tout d’abord, le souci de l’aménagement extérieur de ces rouages ne saurait manquer de tenir sa place, et une place considérable, dans le programme de l’enseignement public allemand à ses diverses étapes. De l’école primaire à l’université, le jeune Allemand se trouve contraint d’acquérir toute espèce d’habitudes qui, plus tard, régleront sa conduite parmi les circonstances qu’il devra traverser. Et il n’y a pas même jusqu’à l’ornementation des rouages qui n’ait préoccupé les auteurs du programme : n’est-ce pas à elle qu’ils ont pourvu, notamment, sous la forme de cette minutieuse et étrange « politesse » que nous nous souvenons d’avoir toujours vue marcher de pair, dans la vie allemande, avec les procédés de la « barbarie » la plus « primitive ? » Combien de fois je me suis étonné,