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Il en résulte qu’en 1911 sur 19 006 inscrits, 52 908 sont inactifs, soit 27 pour 100 du chiffre total ; 90 034 pratiquent une navigation qui ne présente aucun intérêt vital pour la nation, soit 47 pour 100 ; 13 112 inscrits font de la grande pêche. Il n’en reste, en somme, que 33 952 dont la profession semble vraiment indispensable aux intérêts du pays, c’est-à-dire 17 pour 100 seulement des gens de mer.

On ne devrait jamais oublier cette proportion quand on parle de la mobilisation industrielle des marins. Un inscrit ne ressemble souvent pas plus à un inscrit qu’un mécanicien de chemin de fer à un chauffeur de taxi-auto, quoique l’un et l’autre soient des agens de transports.

La Marine aurait dû prévoir d’une façon différente la mobilisation des diverses catégories de réservistes que nous venons d’examiner. Il n’en a rien été. En vue de suivre leur situation, il avait été créé, au siège de chaque quartier, un casier de mobilisation dans lequel tout inscrit mobilisable était porté sur une fiche individuelle. Ce casier comprenait les catégories suivantes désignées par une lettre figurant sur le coin de la fiche : A-B-C, inscrits en sursis, dispensés ou en disponibilité, — D, âgés de moins de trente ans, — E, âgés de trente à trente-cinq ans, et ainsi de suite de cinq ans en cinq ans jusqu’à la lettre II (inscrits de quarante-cinq à cinquante ans). Il n’était tenu compte qu’à titre de renseignement de la navigation pratiquée ; mais, et c’est là l’erreur commise, la mobilisation s’effectuait par catégorie ; il n’était donc pas possible, en l’état des règlemens, d’appeler, par mesure générale, un pêcheur de rivière, un chalutier ou un gabarier, sans lever un caboteur, alors qu’il n’y avait pas les mêmes raisons pour les laisser tous dans leurs foyers.

Nous verrons quelles sont les difficultés qui résultèrent de ce défaut d’organisation.

Jusqu’ici nous n’avons parlé que des inscrits professionnels ; mais la plaie de l’institution, ce sont les faux-inscrits[1]. À une époque où le service militaire obligatoire n’existait pas, le Roi

  1. Une notable partie des 52 908 inscrits inactifs qui figurent à la statistique de 1911 sont des faux-inscrits.