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fréquemment les expéditions de l’étranger ou celles des commissions de réception sont faites en sacs de poids variable, ou de poids uniforme, mais différent de celui qui est fixé pour l’envoi à l’armée, ou même en vrac, pour les pommes de terre par exemple, il faut donc de toute nécessité décharger le tout, soit, en cas d’envoi en vrac, pour ensacher les denrées reçues, soit, dans les autres cas, pour vérifier le réglage des sacs.

On en profite souvent pour contrôler la qualité de la denrée, ou l’améliorer, la passer au tarare, par exemple, s’il s’agit d’avoine, pour enlever la poussière et les pierres, et c’est fort utile à coup sûr. Mais on ne se figure pas, avant de l’avoir expérimenté, ce qu’une simple note de ce genre, si facile à rédiger dans un bureau ou à expédier du front : « Tous les sacs d’avoine devront désormais être réglés à 75 kilos, toutes les balles de foin pressé devront être pesées et étiquetées, » coûte de peine au personnel de la station-magasin : il faut descendre un à un chaque sac ou chaque balle, le faire passer sur la bascule, l’ouvrir pour en compléter ou en diminuer le poids, s’il y a lieu, le changer même, s’il se trouve trop petit, pour l’adjonction à faire, enfin le recharger. Pour peu qu’il s’agisse d’expédier chaque jour deux trains d’avoine, chacun de trente wagons d’une dizaine de tonnes comprenant 133 sacs de 75 kilos, c’est une nombreuse équipe d’hommes qui devra consacrer la journée entière à ce travail pénible et ingrat.

Souvent aussi, un travail de chargement et de déchargement se présente avec un caractère d’urgence absolue ; les hommes auront alors à accomplir un effort énorme en très peu de temps. Les grands transports de troupes qui ont été faits d’un point à un autre du front par autobus ou automobiles de tout genre, exigeaient d’énormes quantités d’essence et d’huile ; c’étaient 1 500 ou 2 000 hectolitres demandés d’urgence à une station-magasin, qu’il fallait faire partir parfois même par marche ou train spécial, pour gagner du temps ; car, bien entendu, en temps de guerre, un train militaire complet et convoyé va trois ou quatre fois plus vite que des wagons ajoutés, à un train quelconque. Il faut alors qu’une équipe d’hommes solides passe la journée entière à charger les bidons de 50 litres, ou les caisses de bidons de cinq à dix litres, pesant chacune dans les soixante kilos avec l’emballage ; ces hommes auront le soir les épaules toutes