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Page:Revue des Deux Mondes - 1916 - tome 32.djvu/416

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campagne, et où la production se ralentit nécessairement, il importe que les échanges s’effectuent aussi librement que possible, par la voie de mer. Toutefois, cette vérité ne s’était point encore affirmée avec un tel éclat. La guerre que nous soutenons est, en raison du chiffre prodigieux des combattans et des richesses dépensées, autant une guerre industrielle et économique qu’une guerre militaire. On se demande ce que nous aurions pu faire sans les vaisseaux marchands pour ravitailler la population civile et les armées ; pour assurer à nos usines l’approvisionnement en combustible et en acier, et pour acheminer sur notre pays tout le matériel de guerre ; armes, munitions, explosifs, matières premières de toutes sortes, qui nous ont permis de suppléer à l’insuffisance de notre préparation. Toutefois, je laisserai ce point en dehors de mon étude, car cela m’entraînerait à trop de développemens, pour me borner à mettre en lumière le rôle joué directement par nos bâtimens de commerce dans la conduite des opérations militaires, ce qui est le trait caractéristique de la guerre navale actuelle.

Une loi du 2 mai 1899 avait réglé la situation des équipages appelés à faire partie, en cas de guerre, de la flotte auxiliaire. L’article 18 de cette loi dispose en effet : « les inscrits maritimes appartenant aux équipages des navires de commerce dont la réquisition pour le service auxiliaire de la flotte est prévue par une convention spéciale conclue avec le département de la Marine peuvent, dès le temps de paix, demander à continuer leur service, en temps de guerre, sur les dits bâtimens pour le cas où la réquisition en serait opérée. » Cette même loi déterminait les grades à attribuer aux capitaines au long cours et officiers mécaniciens embarqués sur ces navires.

Ainsi, le législateur avait bien compté, « dès le temps de paix, » recourir à la marine marchande, mais dans son esprit le choix ne devait se porter que sur une catégorie restreinte de navires. On était loin de se douter, même à l’Etat-major général, de l’ampleur que cette question devait prendre dans l’avenir. En exécution des plans de mobilisation, on réquisitionna, dès l’ouverture des hostilités, des paquebots postaux, que leur vitesse permettait de transformer en croiseurs, des remorqueurs destinés à constituer le service de la reconnaissance qui se créait de toutes pièces, des chalutiers pour le service du dragage