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Louis, quand il me saura malade, quoique je lui aie caché en partie la gravité de mon état, mais j’espère que, s’il venait avec moi, on aurait pour lui la même obligeance que pour moi. A présent, il ne peut plus inquiéter personne, ayant joué son va-tout à jeu découvert. On ne pourra plus supposer qu’il veuille se mêler d’intrigues subalternes au-dessous de la position qu’il a prise, je m’en fais le garant partout. Il paraît que la bonté que l’on a montrée à Paris s’étend jusqu’ici et que l’on regrette de m’avoir fait tant de mal. Le maréchal Gérard m’a fait dire par quelqu’un qui me l’a écrit que le gouvernement français trouverait tout simple que Louis revienne bientôt pour me soigner et que l’on ne fera rien qui puisse l’en empêcher. Je n’ai pas eu de nouvelles depuis le 17 avril, j’ignore donc ce qu’il fait et ce qu’il compte faire. Pour moi, je suis décidée à partir pour l’Italie au 1er septembre. Si j’allais bien avant, je partirais d’ici encore plus tôt pour pouvoir passer six semaines dans les bains sulfureux, en allant. Je compte me reposer un mois à Gênes, autant à Naples, et passer les trois mois de gros froids à Palerme. J’ai été si souffrante que l’on a été longtemps fort sévère pour moi. On n’a pas permis à la Princesse douairière de Hohenzollern de venir me voir plus tôt. Elle vient de passer une semaine avec moi. Sa présence m’a fait grand plaisir et aucun mal. Elle m’a quittée aujourd’hui. Je l’engage beaucoup à venir en Italie. J’attends pour jeudi Eugénie et Joséphine, je me fais un grand plaisir de les voir. Sois sans inquiétude pour ta fille : M. Conneau est là... Je ne pourrais te dire combien j’ai reçu de marques d’intérêt depuis que je suis malade ; il m’en arrive de tous les coins de l’Europe. J’ai été bien sensible à celles que j’ai reçues de la Reine douairière de Bavière. Il y avait si longtemps que nous ne nous étions vues que je ne pouvais espérer qu’elle m’eût conservé toute l’amitié qu’elle m’a toujours témoignée, mais elle vient de m’en donner mille preuves affectueuses, ainsi que le prince Charles ; elle voulait venir me voir.

Voilà un mois écoulé depuis mon dernier accident, sans que j’aie posé le pied à terre ; on me porte d’un lit à l’autre. Mais voici le beau temps, et j’espère qu’un peu de bon air achèvera de me remettre la santé.

HORTENSE.