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et la tendance qu’ils ont à thésauriser non seulement sous forme d’espèces sonnantes et trébuchantes, mais même sous celle de billets. Le Trésor s’efforce de lutter contre cette tendance ; la Caisse centrale, pendant la première quinzaine de mai 1916, a payé 94 pour 100 en viremens. Les trésoriers généraux ont reçu l’ordre de remettre aux fournisseurs de l’Etat les sommes supérieures à 1 000 francs en chèques ou mandats de virement. Le chèque barré, c’est-à-dire celui qui ne peut être encaissé que par un banquier mandataire du bénéficiaire, va recevoir un nouveau développement, grâce à la loi qui affranchit du timbre l’apposition, par le tiré du chèque, de la mention indiquant que le chèque sera porté au débit de son compte par la Banque de France ou par une chambre de compensation. Les versemens à faire aux comptables du Trésor et des régies financières, notamment pour le paiement des impôts, peuvent être effectués en chèques barrés. L’administration, — il faut l’en féliciter, — rajeunit ses procédés de perception et de comptabilité, et les met en harmonie avec les habitudes commerciales plus simples et plus économiques. Elle exerce ainsi une influence restrictive sur la circulation des billets.

Cette restriction peut avoir quelque action sur les cours des changes, bien que la hausse doive en être presque exclusivement attribuée aux achats considérables que nous ne cessons d’effectuer à l’étranger. C’est un problème ardu, dit très justement M. Ribot, que de combler le déficit de notre balance commerciale. Le gouvernement a donné sa garantie à des crédits qu’ont pu obtenir, au dehors, des fournisseurs français d’objets intéressant la défense nationale. Il a émis à Londres des Bons du Trésor ; il y a placé des titres de l’emprunt 5 pour 100, dont le cours s’est élevé de plusieurs unités au-dessus du prix d’émission, ce qui, soit dit en passant, indique la confiance que les Anglais ont dans le crédit de la France. Il a acheté des titres américains cotés à la Bourse de Paris, qui lui ont procuré des ressources sur la place de New-York. Il vient enfin, à l’exemple du chancelier de l’Echiquier britannique, d’adresser un appel aux porteurs français de titres de pays neutres, en les invitant à lui prêter, pour la durée de la guerre, ces titres, qui lui permettront d’acquérir du change sur un certain nombre de places étrangères. Les arrangemens pris avec la Trésorerie britannique et ceux qui sont intervenus entre la