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elle leur achetait : seigle et avoine, viande et lard. En effet, depuis que la Suède a cessé d’être un État purement rural, — un tiers de la population étant employé dans les manufactures, — elle a perdu le pouvoir de se nourrir elle-même : 3 millions de quintaux de grains, presque autant de viande, 30 millions d’œufs, etc., y étaient annuellement importés. Aussi le prix des blés, — ou plutôt des seigles dont il se consomme deux fois plus, — monta-t-il jusqu’à 70 pour 100 au-dessus du taux ordinaire, en ce pays qui jouissait pourtant, comme ses voisins, d’une « commission de ravitaillement » et de maxima imposés par décret.

On se mit spontanément à fabriquer par économie un pain spécial, avec des flocons de pommes de terre mélangées à la farine dans la proportion de 10 pour 100 ; la distillerie fut supprimée pendant quatre mois et l’on fut sur le point d’interdire l’emploi du grain pour les bestiaux. La hausse n’est plus maintenant que de 30 pour 100 sur le pain et c’est au même taux que l’on évalue le renchérissement moyen de l’alimentation depuis la guerre. Ici, comme en Hollande, les chiffres sont exprimés en une monnaie qui fait prime de 29 pour 100 sur l’allemande. Le surcroît de dépenses, que l’on peut évaluer à 230 francs par an pour un ménage de travailleurs, a été compensé par une hausse sur les salaires. Les mêmes phénomènes s’observent en Norvège et en Danemark, en tenant compte, pour ce dernier royaume, que les prix du temps de paix y étaient toujours plus bas que dans les deux autres.

Il se produisit de brusques sauts, lorsque Copenhague, l’an dernier, acheta en un jour 690 000 livres de thé sur le marché anglais, alors que ses acquisitions normales étaient de 1 100 000 livres par an ; il y eut aussi un boum du hareng, qui doubla, et une baisse passagère de la viande en 1914, parce que la rareté des fourrages avait fait abattre quantité de bétail. Sur le beurre, les interdictions autant que les licences de sortie firent osciller fortement les cours ; ils s’étaient élevés en Scanie à 6 fr. 50 le kilo lorsque le gouvernement suédois en prohiba l’exportation, sauf pour qui s’engage à vendre à l’intérieur partie de sa production à prix convenus. Sur l’exportation des beurres, si le gouvernement danois ne publie aucune statistique et prend toutes les précautions pour empêcher le public d’être renseigné, c’est qu’il redoute de mécontenter soit