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l’Allemagne qui paie 3 couronnes 45 le kilo, soit l’Angleterre qui ne paie que 2 couronnes 50, mais qui tient la clef des provisions d’outre-mer.

Chez les Alliés, la cherté vient d’une disproportion entre les besoins et les ressources, entre la consommation et la production ; quelques citoyens en profitent un peu, la nation y perd beaucoup parce qu’elle doit acheter au dehors et, — sauf l’Angleterre, — payer une prime sur les monnaies étrangères.

Chez les neutres, au contraire, dont les monnaies sont toutes au pair, certaines marchandises ont haussé sensiblement, il est vrai, sous l’influence des frets, — la tonne de charbon, par exemple, de 16 à 40 couronnes en Suède et les dépenses d’exploitation des chemins de fer ont passé de 55 à 71 millions ; encore le gouvernement de Stockholm s’est-il procuré 12 millions de tonnes de Cardiff à bon marché en échange de certaines facilités de transit pour la Russie ; — mais, comme la cherté de tous les produits indigènes venait uniquement d’une demande exceptionnelle de l’étranger, les classes agricoles et commerçantes ont réalisé de gros profits.

En Danemark, les dépôts aux caisses d’épargne rurales ont quintuplé ; à Copenhague même ils ont diminué ; mais, dans l’ensemble, à voir les emprunts Scandinaves largement souscrits au pair dans chacun des trois royaumes ; à voir le rachat par les Danois, à un taux avantageux, de la presque totalité des actions de l’Union danoise de crédit, société hypothécaire naguère en mains allemandes ; à voir enfin le chiffre de 75 millions de francs auquel monte cette année la taxe sur les bénéfices de guerre dans ce pays de 2 millions et demi d’habitans, on se rend compte que la vente de tous les stocks, de toutes les provisions qu’ils ont écoulés à haut prix a créé dans la région Scandinave une balance pécuniaire favorable.

Chez les neutres aussi, l’arrêt des importations, c’est-à-dire des concurrences étrangères, a suscité ou ressuscité des industries nouvelles ou mourantes : telle, en Espagne, celle du sucre qui traversait avant la guerre une crise terrible. « Nous avons, disait un fonctionnaire espagnol, les sucreries les plus perfectionnées comme matériel ; mais il existe entre nos betteraves et celles de l’étranger une différence de 15 à 20 francs la tonne ; le combustible, principal auxiliaire de la fabrication, et les moyens de transport sont chez nous aussi insuffisans que chers ;