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REVUE MUSICALE.

que, l’an dernier, nous avons ici même étudiée, mais la musique militaire proprement dite ; au lieu de l’image, ou de la figure, nous ne regarderons en elle aujourd’hui que la compagne et l’auxiliaire des soldats.

« Josaphat, qui ne voyait aucune ressource contre l’armée effroyable de la ligue des Iduméens, des Moabites et des Ammonites, soutenus par les Syriens ; après avoir imploré le secours de Dieu et en avoir obtenu les assurances certaines par la bouche d’un saint prophète, comme il a été remarqué ailleurs, marcha contre l’ennemi par le désert de Thécua et donna ce nouvel ordre de guerre : « Qu’on mit à la tête de l’armée les chantres du Seigneur, qui, tous ensemble, chantassent ce divin psaume : Louez le Seigneur parce qu’il est bon, parce que ses miséricordes sont éternelles. » Ainsi l’armée change chœur de musique ; à peine eut-elle commencé ce divin chant, que les ennemis, qui étaient en embuscade, se tournèrent l’un contre l’autre et se taillèrent eux-mêmes en pièces ; en sorte que ceux de Juda, arrivés à une hauteur vers la solitude, virent de loin tout le pays couvert de corps morts, sans qu’il restât un seul homme en vie parmi les ennemis, et trois jours ne suffirent pas à ramasser leurs riches dépouilles. Cette vallée s’appela la Vallée de la Bénédiction, parce que ce fut en bénissant Dieu qu’ils défirent une armée qui paraissait invincible. Josaphat retourna à Jérusalem en grand triomphe, et, entrant dans la maison du Seigneur au bruit de leurs harpes, de leurs guitares et de leurs trompettes, on continua les louanges de Dieu, qui avait montré sa bonté dans la punition de ces injustes agresseurs. »

Parmi les exploits de la plus vieille musique militaire, notre érudit confrère aurait pu citer la victoire, en quelque sorte musicale, que Bossuet rapporte ainsi, magnifiquement[1]. Il s’est contenté d’emprunter d’autres exemples, plus connus, et, pour ainsi dire, classiques, à l’histoire d’Israël ou de l’Égypte, de la Grèce ou de l’Assyrie.

En son état primitif et barbare encore, il semble bien que la musique militaire ne se soit proposé rien d’autre que d’effrayer l’ennemi par des cris, des menaces, et par le fracas d’engins grossiers et bruyans. Mais bientôt elle s’éleva à de plus nobles emplois. Elle se reconnut capable, non seulement de régler des mouvemens, de signifier des commandemens de guerre, mais aussi, et peut-être surtout, de soutenir, d’exciter le courage des combattans. Sensible à

  1. Politique tirée de l’Écriture sainte ; livre IX, chap. IV, première proposition.