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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 43.djvu/550

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hauteur de 500 mètres, moteur arrêté, les voyages triangulaires, l’épreuve d’altitude, celle de durée, qui doivent lui conférer le brevet militaire, sont bientôt pour lui des jeux. En mai, il pilote presque quotidiennement un passager sur M.S.P. (Morane-Saunier- Parasol). Son livret ne porte, pour toute cette période, qu’une seule panne. Enfin, le 25 mai, il est envoyé à la réserve générale d’aviation. Le 31, il vole deux fois sur un Nieuport avec passager. L’apprentissage est terminé : le 8 juin, le caporal Georges Guynemer est désigné pour faire partie de l’escadrille M. S. 3, qu’il rejoint le lendemain à Vauciennes.

La M. S. 3, c’est la future N. 3, l’escadrille des Cigognes. Elle est déjà commandée par le capitaine Brocard, sous les ordres de qui elle s’illustrera. Védrines en est. Le sous-lieutenant de cavalerie Deullin y arrive presque en même temps que Guynemer dont il deviendra bientôt l’ami. Peu à peu, les rejoindront Heurteaux, de la Tour, Dorme, Auger, Raymond, etc. tous les preux célèbres de l’escadrille, pareils aux pairs de France qui suivirent Roland sur les routes d’Espagne. Le camp d’aviation est à Vauciennes, proche Villers-Cotterets, dans ce pays de Valois aux belles forêts, aux châteaux de plaisance, aux grasses prairies, aux contours délicats atténués par la vapeur humide qui monte des étangs ou des bois : « Calme complet, écrit, le 9 juin, Guynemer ; pas un bruit, on se croirait dans le Midi, sauf que les habitans ont vu le fauve de près et savent nous apprécier… Védrines m’a pris en amitié et me donne d’excellens conseils : il m’a recommandé à ses mécanos, qui sont le vrai type du Parisien débrouillard, inventif et bon vivant… » Le lendemain, il fournit quelques détails sur son logement, puis il ajoute : « Je me suis fait monter un support de mitrailleuse et je suis prêt à partir en chasse… Hier, à cinq heures, j’ai virevolté au-dessus de la maison, à 1 700 ou 2 000 mètres. M’avez-vous vu ? J’ai poussé mon moteur pendant cinq minutes pour que vous m’entendiez… »

Il est à peine sorti de la maison, et le bon hasard veut qu’il soit précisément appelé à combattre, au-dessus des lignes qui protègent sa maison. Le front de la VIe armée à laquelle il est rattaché, de Ribécourt au-delà de la forêt de Laigue, passe devant Bailly et Tracy-le-Val, se creuse au saillant ennemi de Moulin-sous-Touvent, se redresse sur Autrèches et