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II. — L’0FFENSIVE FRANÇAISE (13-16 SEPTEMBRE)

On connaît au Grand Quartier français, et la marche du VIIe corps allemand vers la région de Soissons, et le caractère singulièrement abrupt des falaises de l’Aisne. Plus que jamais, Joffre estime que, si les Anglais et d’Esperey doivent vigoureusement attaquer au Sud et à l’Est du massif, ne fût-ce que pour y fixer les masses allemandes, « c’est des forces de gauche… que dépend… le sort de la bataille engagée. » Sans doute entend-il que d’Esperey, « orientant sa marche un peu plus vers le Nord, » appuie son 18e corps « pour rompre le dispositif ennemi ; » sans doute insistera-t-il le lendemain pour que, dès qu’il sera maître du massif de Brimont à l’Est, « il dispose ses forces au Nord-Ouest de la route de Reims à Neufchâtel, de manière à les porter sur la rive droite de l’Aisne ; » — et par-là il montre assez que le massif se peut, à son sens, tourner à l’Est comme à l’Ouest ; c’est cependant sur la manœuvre de l’Ouest qu’il fonde ses principaux espoirs. On est maintenant persuadé au Grand Quartier (j’en crois les notes quotidiennes d’un officier) que « l’idée allemande est d’organiser une bataille, défensive sur l’Aisne. » Mais il parait bien que si l’on doit laisser les Anglais tenter d’aborder le Chemin des Dames, ce n’est point là-dessus que l’on compte pour obtenir la décision : si d’Esperey se trouve, du fait des résistances qui, de Brimont à la hauteur de la Pom pelle, retiennent son centre et sa droite, empêché d’engouffrer toute son armée dans la trouée de Juvincourt, le massif, fortement attaqué d’ailleurs de Craonne à Soissons, sera tourné à l’Ouest par Maunoury qui, à tout prix, doit tirer vers la vallée de l’Oise et y engager son gros. Le 13e corps ne lui a été envoyé qu’à cet effet.

Le général Maunoury se trouve à la vérité aux prises avec les plus grandes difficultés : le gros de ses forcés, qui a passé l’Aisne les 12 et 13, est engagé sur l’énorme plateau occidental. Ebener, avec le 6e groupe de divisions de réserve, Vauthier avec son 7e° corps y ont pris pied, mais s’y heurtent à la résistance qu’on pouvait attendre en ce pays accidenté, du moment que l’ennemi faisait front appuyé par sa grosse artillerie. Par surcroît, le groupe Lamaze n’a pu, le 13 encore, franchir l’Aisne entre Fontenoy et Soissons, sauf la 45e division, qui,