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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/259

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toutes deux transfuges de la voile et transformées par la vapeur, nombre de navires petits et bons marcheurs. Ils offraient pour les opérations qui allaient devenir les plus actives, une avant-garde de yachts rapides, et un corps de robustes chalutiers. Les chalutiers avaient été pour la première fois mêlés à la guerre, dans la nuit du 21 au 22 octobre 1904. Des bateaux anglais de Hull pêchaient à la place même où leurs pareils devaient, dix ans plus tard, jeter d’autres filets et poursuivre d’autres captures. La flotte russe, qui se hâtait vers son destin, tira sur eux, se croyant déjà menacée par les Japonais. Et l’enquête de la Haye prouva combien se confondent les réalités et les fantômes dans les brumes des eaux boréales et des imaginations hallucinées. En 1914, les chalutiers fournirent le gros des 2 000 navires qu’il fallait. Leurs équipages furent formés par 50 000 matelots de commerce et de pêche que la guerre faisait oisifs. Le commandement fut confié aux officiers des paquebots et des chargeurs qui avaient cessé de tenir la mer et aux patrons qui, sur nombre de chalutiers, n’ayant changé ni de bateau ni d’équipage, débutaient en vétérans dans leur nouveau service. L’Amirauté n’eut à fournir que l’armement, c’est-à-dire sur le pont quelques rouleaux de fil de fer, quelques chapelets de torpilles, sur la proue une petite pièce de chasse, par exception quelques canons-revolvers sur les bordages : et ces navires devinrent aptes à mouiller comme à draguer les mines, et pas tout à fait inaptes à se défendre.

Mais plus leur principale activité, l’immersion et le relevage des mines, était à redouter par l’ennemi, moins il était probable qu’il les laissât faire. Contre eux il allait employer, non une artillerie de bateaux pêcheurs, tout juste de force à trouer les coques sans les disjoindre, mais des torpilles capables d’anéantir où elles touchent. Contre les lanceurs de torpilles, sous-marins ou « destroyers, » l’on ne pouvait armer de torpilles les chalutiers : dans, les destroyers comme dans les sous-marins, toute la structure du navire est subordonnée à l’engin dont ils sont l’affût, leurs équipages sont familiarisés avec des manœuvres spéciales, et leurs commandants ont une technicité étrangère aux matelots et aux officiers du commerce. Force était donc, sous peine d’abandonner ces flottes auxiliaires à la destruction, que la marine militaire consacrât à leur défense un certain nombre de ses destroyers et de ses sous-marins. Telles furent