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Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 48.djvu/459

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accroissement de ses possessions africaines ne suffiraient à ses besoins : c’est un autre Allemand, un ancien ministre, M. Bernard Dernburg, qui l’a proclamé dans la Neue Freie Presse.

Demain, comme dans la période actuelle de la guerre, l’univers devra continuer de se rationner faute d’une production et de moyens de transport équivalant aux nécessités les plus urgentes ; il faudra donc une entente internationale pour régler la répartition des produits existants entre les intéressés ; il sera à coup sûr légitime que ceux qui ont le plus pâti du crime allemand soient servis avant leurs agresseurs : sans seulement effleurer ce second point, le même Dernburg reconnaît qu’une entente est inévitable.

Mais demain aussi, sous peine d’irréparable négligence, les détenteurs des produits indispensables à l’Allemagne ne devront rien lui vendre, sans avoir pris telles sécurités que de droit pour que les produits cédés ne servent pas, directement ou non, à préparer de nouvelles agressions et de nouvelles atrocités, pour que ce qui doit être employé aux travaux de la paix ne soit pas détourné vers les œuvres de guerre ; plus le gigantesque effort de l’Allemagne se concentre désormais dans une revendication éperdue de matières brutes et de débouchés, plus apparaît l’intérêt des Alliés à limiter les unes et à restreindre les autres.

Et, si le peuple allemand doit jamais faire payer à ses maîtres prussiens le prix du sang versé sur leur initiative, c’est en brisant la prospérité dont il s’est grisé, c’est en ne lui abandonnant que le strict nécessaire à sa subsistance qu’on y parviendra le plus sûrement, bien mieux en tout cas qu’en le contraignant à telle ou telle réorganisation politique que la main de l’étranger lui rendrait insupportable.

Tel est le devoir immédiat, le devoir tracé par l’étude du plus récent passé et l’observation objective des conditions présentes, le devoir que proclament les travailleurs sérieux des deux mondes.

Un neutre germanophile a, dans la National Zeitung de Bâle, du 31 mai, remarquablement résumé la psychologie des principaux belligérants de l’Entente : « Les Français ont adopté lu mot d’ordre « tout ou rien. » L’Amérique, avec un enthousiasme de croisade, devient chaque jour plus fanatique. L’Angleterre a conscience qu’en reconnaissant la victoire allemande