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qui ont des bagues en aluminium, don de nos poilus, se les voient enlevées : l’aluminium est un métal précieux pour l’armée allemande !

Tortionnaires méticuleux, les Allemands descendent aux détails les plus infimes et les plus vils, pour humilier leurs victimes et les vexer sans arrêt. Toutes les occasions leur sont bonnes. Y a-t-il une inspection dus baraquements ? Les « otages » sont maintenues dehors, pendant une heure et demie ou deux heures, sous la pluie battante, au vent ou au grand soleil. « Ils se plaisaient, en outre, à nous froisser constamment dans notre pudeur : tous les quinze jours, nous étions soumises à une douche que nous recevions par groupe de vingt-cinq… Les water-closets, établis dans une baraque, se composaient d’une planche de dix mètres de long, percée de dix trous sans séparation… Il fallait faire longtemps queue pour enfin avoir une place et nous nous y trouvions en contact, comme d’ailleurs à tout moment, avec les prisonnières de droit commun qui étaient internées dans le camp. Beaucoup étaient des femmes de mauvaise vie dont les propos nous révoltaient. »

Afin d’abattre le courage des prisonnières, on ne les autorise pas une fois à écrire à leurs parents restés en pays envahi. « Pendant toute la durée de ma captivité, mon mari n’a pu obtenir de savoir ce que j’étais devenue, quand je lui serais rendue, et je n’ai pas eu de ses nouvelles… »

Cependant, pas un instant, les prisonnières ne se laissent abattre. Nulle privation, nulle torture n’entame leur force morale. Les Allemands n’en reviennent pas ! Cette fierté qui dresse contre eux leurs captives, cette maîtrise de soi que conservent nos compatriotes dans leurs épreuves, faute de la comprendre, ils la qualifient d’indifférence, d’apathie.

— Ces Françaises, rien ne leur fait ! s’exclament-ils.

Et, une autre fois, dans un accès de fureur, apostrophant directement une de leurs victimes :

— Mais vous ne comprenez donc pas que vous êtes entre nos mains ? Nous pouvons vous broyer si nous le voulons, vous faire souffrir davantage !…


Chaque matin, dès cinq heures et demie, en pleine nuit, tant que dure l’hiver, les otages sont réveillées par une sonnerie de