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secours ne parvenaient qu’aux quémandeurs professionnels au détriment des pauvres vraiment intéressants. Les secours parviennent-ils à ceux-ci, ils risquent encore d’être détournés de leur plus utile « emploi par l’ignorance, — surtout en matière d’hygiène, — des intéressés. A tous ces points de vue nous sommes, hélas ! restés beaucoup trop byzantins. L’œuvre dont je voudrais parler à mes lecteurs s’appelle le « Secours de guerre. » Elle n’est pas seulement unique par l’ampleur, sans seconde depuis la guerre, de son effort ; elle l’est aussi bien par l’application systématique de certaines données toutes nouvelles, surtout en matière d’hygiène, — et par lesquelles elle relève directement de la critique scientifique. A l’heure où se réunit à Cannes un Congrès où les philanthropes sont mêlés aux savants et qui doit enseigner aux peuples l’hygiène et la lutte intelligente contre la misère et la maladie, à l’heure où nous voyons les Américains poursuivre en France contre la tuberculose l’admirable effort de charité scientifique, dont j’ai déjà parlé ici même, il est bon que l’on sache que des Français aussi ont su hardiment innover dans ce domaine. Leur effort intelligent et tenace mérite d’être connu et imité ; il mérite de servir de modèle comme on le verra, je pense » par ce bref exposé.

Le Secours de guerre a été fondé, au début même des hostilités, avec une somme de trois cents francs pour tout capital.. Son fondateur est M. Paul Peltier. Simple commissaire de police, officier de paix du 6’arrondissement, il fut, dès le début, secondé avec une abnégation qui ne s’est pas démentie, par de modestes soldats du devoir, par les gardiens de la paix sous ses ordres. M. Paul Peltier est un grand cœur servi par une intelligence aiguë, c’est tout ce que j’en veux dire. Au surplus, on le jugera sur son œuvre que nous allons décrire. Cette œuvre s’est installée dès le début dans les locaux du séminaire Saint-Sulpice alors vacants, et dont le caractère est certes mieux respecté ainsi qu’il ne l’eût été par l’installation projetée d’un musée. C’est ce qu’a admirablement défini le cardinal Amette, lorsqu’il écrivait naguère : « L’œuvre du Secours de guerre, organisée au séminaire Saint-Sulpice par une initiative et avec des concours dignes de tous éloges, a soulagé une multitude de détresses. J’ai été heureux de voir la maison si chère à mon éducation cléricale consacrée, momentanément du moins, à l’exercice de la charité. » Cette œuvre qu’entre tant d’autres adeptes enthousiastes, le bâtonnier Henri Robert a appelée « le triomphe de l’initiative privée bienfaisante et généreuse, » voyons maintenant dans quelles circonstances elle est née.