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constants entre les habitants du château et ceux de ses entours. Chaque samedi, en effet, il y a fête à Courpalay et La Fayette lui-même ouvre le bal. Les villageois élégants, nous dit Lady Morgan, ont « les cheveux poudres de neige avec une immense queue » et les femmes « un coquet bonnet de dentelles. » Le « bal » se transporte ensuite au château où les laquais et six femmes de chambre dansent « un quadrille très correct » avec les petites-filles de La Fayette, tandis que le concierge joue du violon [1].

Tout cela est du meilleur exemple social. Mais existe-t-il des tableaux sans ombre ? Non certes. Sans aller jusqu’à dire, comme la duchesse de Broglie, que La Fayette « est un prince entouré de gens qui le flattent et le pillent et dont la belle fortune s’est éparpillée entre les mains des aventuriers et des espions, » on peut tenir pour certain qu’il n’eut pas toujours le sens de la mesure et qu’il poussa loin les défauts de ses qualités. Il serait pénible d’insister sur les dernières années du général et de dire que jusqu’à sa mort, — qui advint à Paris le 19 mai 1834, — La Grange fut surveillé par la police comme « asile du carbonarisme. » Laissons dans la pénombre ces fâcheux incidents, et, pour nous résumer, jetons un regard sur le passé, souvenons-nous des premières années que La Fayette vécut à La Grange, tout à la vie rurale, tout à sa famille et tout à ses œuvres. Ces années, il les a caractérisées lui-même en disant : « Elles s’écoulèrent rapides comme la joie ! »


ANDRÉ DE MARICOURT.

  1. Le 9 octobre 182(, une véritable ovation fut faite à La Fayette revenant d’Amérique. 4 000 personnes prirent part à une fête à La Grange. On le porta en triomphe sur la prairie.