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fonctionnaient sous la direction du Sénat : la commission disciplinaire qui avait juridiction sur les étudiants et la commission administrative qui donnait son avis sur la gestion des biens de l’Université.

Le grand inconvénient d’une pareille organisation saute aux yeux. Aucun pouvoir permanent n’assure le gouvernement et l’administration de l’Université, car le Sénat est renouvelé tous les ans, à l’exception du recteur qui, sous le titre de prorecteur, y siège une seconde année. Aussi personne ne songe-t-il à défendre ces dispositions du statut allemand. En revanche, on vante beaucoup l’institution du recteur élu, on veut y voir la garantie des privilèges de l’Université, le signe de son indépendance.

Observons que le recteur ne pouvait être choisi que parmi les professeurs ordinaires, c’est-à-dire parmi des fonctionnaires impériaux. Notons que ce choix n’était valable qu’après approbation de l’Empereur, ce qui diminuait déjà l’indépendance du Rector magnificus et par suite celle de l’Université. Mais regardons de plus près ce que cachait cette façade médiévale, et nous découvrirons que la fameuse autonomie de l’Université était un leurre.

A côté du recteur se tenait le curateur. Celui-là était un simple fonctionnaire de carrière, nommé par l’Empereur et choisi le plus souvent pour des raisons qui n’avaient rien de commun avec le bien de l’Université. Veut-on se rendre compte du véritable caractère de la fonction ? Back, l’ancien maire de Strasbourg, y fut appelé en récompense de ses services politiques. Le rôle du curateur transparaissait déjà à travers certains articles du statut, mais il était autrement important que ne le laissait supposer la loi écrite. En réalité, il disposait du budget de l’Université, car c’était lui qui transmettait aux services de Berlin les desiderata des diverses Facultés. Il avait sous ses ordres une troupe d’employés dont les traitements annuels montaient à 64 970 marks. Enfin, l’on devine quelle devait être l’influence de ce fonctionnaire impérial et permanent en face des grands dignitaires de l’Université dont l’autorité était éphémère.

Ce qu’il fallait penser de l’autonomie de l’Université, on le vit en 1901, quand, contre le gré de la Faculté de philosophie, Guillaume II nomma Martin Spahn professeur d’histoire à