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à reprendre un plan d’attaque contre les Autrichiens et quand, le 23 juin, les Autrichiens, ayant, au contraire, sur l’incitation de l’Etat-major allemand, attaqué sur la Piave, ont été reconduits en très mauvais arroi, il presse l’État-major italien d’exploiter le succès, de monter tout au moins l’attaque sur le Trentin pour le jour où les Alliés passeront à l’offensive d’ensemble sur tous les fronts, « c’est-à-dire vraisemblablement au mois de septembre. » Lorsque, le 29 juin, les Italiens ont, entre le Valbella et la Brenta, reconquis des positions, il les encouragea plus oser encore. Par ailleurs, il examine et approuve le projet d’offensive qui, partant de Salonique, ébranlera un jour l’Orient de ses coups redoublés. Enfin il est de ceux qui poussent le président Wilson à envoyer des troupes américaines en Sibérie, car l’expédition doit être considérée comme un très puissant facteur de victoire à la condition d’agir sans délai. Il y a quelque grandeur à voir, tandis que l’ennemi est encore à Château-Thierry et à Montdidier, le grand soldat français animer de son infatigable esprit d’entreprise les fronts les plus lointains. C’est qu’il prévoit que l’événement attendu vase produire avant peu qui, renversant la situation, peut être le signal d’une débâcle, — à la condition que l’ennemi se sente, sinon attaqué, du moins inquiété de toutes parts. Enfin, pour que le coup de grâce puisse être asséné au plus tard en 1919, il demande que l’Amérique intensifie encore son effort ; il faut que les États-Unis incorporent 300 000 hommes par mois en moyenne pendant les six derniers de 1918. Ainsi ne cesse-t-il de répéter qu’on pourra, tous les fronts étant en mouvement, attendre avec une ferme confiance cette année 1919 où, l’Allemand ayant été, en 1918, chassé de ses positions de France, l’Europe centrale sera assaillie et forcée à la capitulation.

Ce qui, dans tous les temps, a distingué le génie, — et Napoléon a porté ce trait à l’extrême, — c’est le souci des réalités pressantes inséparables des plus grandes combinaisons. Un Foch peut, de son Quartier Général de Bombon, embrasser de l’œil le monde en guerre et songer au dernier modèle de char d’assaut qu’un Estienne met en exercice dans son camp de Bourron., Mais, par-dessus tout, ayant trouvé, nous le savons, la parade qu’un Haig ou un Pétain opposera à l’attaque imminente, il s’occupe maintenant de la contre-offensive qu’il prépare sur le plateau de Soissons.