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Pour beaucoup de gens, la célèbre attaque de flanc qui, le 18 juillet, allait mener l’armée Mangin de la forêt de Villers-Cotterets aux abords de Soissons, reste une riposte improvisée à l’offensive des Allemands sur les fronts de Berthelot et de Gouraud. Il est certain qu’elle sera déclenchée avec une rare opportunité sur le flanc d’un ennemi, désemparé par un formel échec sur le front Gouraud et fort aventuré par un fatal demi-succès sur le front Berthelot. Mais on n’improvise point une contre-offensive comme celle dont le Soissonnais allait être le théâtre : elle était depuis des semaines non seulement à l’étude, mais en voie de prochaine réalisation.

La seule vue de la situation de juin 1918 l’imposait et, dès le 14 juin, Foch avait invité Pétain à la faire préparer : il fallait reconquérir les plateaux dominant Soissons à l’Ouest et nous mettre ainsi en mesure d’interdire à l’ennemi l’utilisation des voies ferrées qui passaient par ce point. On obtiendrait ce résultat par une avance sur le plateau de Dommiers tout au moins jusqu’au ravin de Missy aux Bois, — et ce serait la grande journée des chars d’assaut.

L’offensive était, dès la fin de juin, confiée au général Mangin, commandant maintenant la 10e armée. Et, de jour en jour, elle prenait dans la pensée de Foch une importance plus grande. Combinée avec une offensive du général Berthelot, entre Reims et la Marne, elle pouvait, poussée plus loin, « compromettre gravement la situation de l’ennemi dans la partie Sud du saillant de Château-Thierry. » Le résultat serait sans doute d’obliger celui-ci à évacuer tout le saillant dans des conditions difficiles. Le 7 juillet, cette pensée était soumise à l’étude de Pétain. Celui-ci, incontinent, proposait un plan qui était approuvé. Les indices étant maintenant certains, — j’y vais revenir, — d’une attaque des Allemands à l’est et à l’ouest de Reims, l’intervention de Mangin deviendrait une contre-offensive brusquée, excellent moyen défensif qui pouvait être d’une efficacité supérieure, « susceptible de neutraliser l’offensive allemande à l’ouest de Reims. »

Cependant le général en chef ne perdant jamais de vue l’autre partie de son champ de bataille, incitait le maréchal Haig à préparer de son côté une offensive et même plusieurs