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recevait ses défenseurs, d’une telle densité qu’aucun enfoncement, aucune infiltration même n’était à craindre.

La deuxième position, plus en arrière, était, à toute aventure, solidement garnie de troupes. Et notre artillerie, — singulièrement renforcée, — se révélait formidable à l’ennemi stupéfait.

Le bombardement allemand affectait le front des 4e et 21e corps, puis il allait en décroissant vers l’Aisne, sur le front du 8e corps. Il était, lui aussi, formidable : tous ceux qui l’essuyèrent en garderont le terrifiant souvenir. A la vérité, si le harcèlement s’étendait sur les arrières jusqu’à Châlons, le tir s’exerçait surtout sur la première position abandonnée où les obus éclataient en des tranchées, nous le savons maintenant, aux trois quarts vides.

A 4 heures 15, l’infanterie allemande bondit des siennes et se lança à l’assaut précédée d’un savant barrage roulant. Les fusées s’élevèrent alors de notre première position, signalant le départ, puis dénonçant les phases de l’assaut. C’étaient nos admirables soldats d’avant-postes qui criaient aux camarades et aux chefs leur Morituri te salutant.

Sur le front du 4e corps, à la gauche de Gouraud, l’ennemi, se heurtant à ces éléments avancés, put croire, tant ceux-ci se comportèrent vaillamment, affronter une position réellement défendue ; notamment les mitrailleuses placées dans les blockhaus Sud du Casque et du Téton, tinrent longtemps l’assaillant en échec. Deux heures après le départ, celui-ci en était encore à se battre sur cette ancienne première position d’où nos bataillons cependant se retiraient lentement, attirant vers la dangereuse plaine l’ennemi persuadé que, cette résistance vaincue, la partie était aux trois quarts gagnée. Or, abordant vers 7 h. 30, déjà fatigué de cet effort, la position intermédiaire, il la trouvait si solidement tenue, que, presque partout, il en restait immédiatement déconcerté.

Toutefois, l’élan de ses bataillons de droite était tel qu’ils parvinrent jusqu’à Prunay et semblèrent devoir franchir la ligne : mais au Sud du village, ils étaient arrêtés net. D’autres bataillons parvinrent jusqu’au Nord de Fresnes, plus à l’Est, et pénétrèrent dans la position intermédiaire jusqu’à la voie romaine ; la mêlée s’engagea, corps à corps terrible ; mais déjà l’ennemi n’avait plus sa vigueur du départ ; la vague reflua. Elle était, plus à l’Ouest encore, arrêtée.