Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 53.djvu/386

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui plus ou moins confirment leurs aveux ; de même Florent-Guyot qui déjà marque des réticences assez fortes, mais à la fin, le mardi 28, on arrive à Jacquemont, auquel on témoigne tout de suite des égards sans précédents. En effet, il ne s’agit plus ici d’interrogatoire et de réponses que suggèrent d’autres questions plus pressantes, qui se succèdent dans un ordre logique, qui déconcertent l’inculpé, et qui l’amènent à des aveux. C’est à Jacquemont qu’on remet la direction de son interrogatoire. On lui donne lecture des déclarations de Florent-Guyot et de Malet, des procès-verbaux de confrontation de Jacquemont, Malet et Florent-Guyot, de la lettre que lui, Jacquemont, a écrite au préfet de Police, de la lettre que Florent-Guyot lui a écrite à lui-même, et de son interrogatoire sur ce sujet. « M. Jacquemont, à la suite de la lecture de ces pièces, après avoir déduit quelques motifs généraux, demande à rédiger sa réponse à tête reposée, déclarant que c’est pour donner à ses déclarations toute la maturité et l’exactitude qui pourront établir la vérité aux yeux de MM. les commissaires conseillers d’État. » Sans plus discuter, on remet à Jacquemont les copies des pièces qu’on lui a lues, et même le procès-verbal de la confrontation de Malet et de Florent-Guyot qui date de la veille ; et, travaillant sur ces pièces, Jacquemont produit un morceau de psychologie fort intéressant, où il ne répond à aucune des questions précises qui auraient dû lui être posées, mais où, reprenant la théorie qu’il a fait valoir lors de son interrogatoire, il parvient à noyer, dans un vague complaisant, des faits qu’il ne veut ni nier, ni avouer complètement.

Autant il a été courtois et prudent à l’égard de Florent-Guyot, autant il affecte un dédain presque agressif vis-à-vis de Malet, et ayant remis cette pièce, « consistant en une feuille écrite sur trois de ses pages, il laisse MM. les conseillers d’Etat interroger à l’aise Demaillot. » A la séance du 29 au matin, Dubois, qui n’entend point rester sous le coup des dénégations de Jacquemont, derrière lequel il sent Fouché, lui pose des questions pressantes sur ses conversations avec Florent-Guyot toutes les fois qu’il a conféré avec lui sur les affaires de la France. Il ne gagne rien, et Jacquemont continue à affirmer que les déclamations les plus graves qu’il a faites à Florent-Guyot comme à Malet « n’étaient pas dites sérieusement, mais par forme de plaisanterie. » Real insiste sur « l’inconvenance du