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les déclarer supposés, à exiger qu’on lui représente les originaux. Ce n’est que le 20 juillet qu’il se rend à Alexandrie. Cependant, par décret du 11 juillet, l’Empereur a constitué une commission de trois conseillers d’État : Lacuée, Jaubert et Corvetto, pour examiner sa conduite. Cette commission, réunie le 9 août, après s’être fait donner lecture des pièces et d’un mémoire que Malet a adressé au président, « est maintenant d’avis qu’il n’y a pas lieu à déclarer que l’inculpation n’est pas fondée. » — Elle estime ensuite qu’elle devra entendre le général Malet.

L’examen approfondi auquel elle se livre des griefs relevés contre le général : établissement de jeux, — contributions exigées des capitaines de navires français, — arrestation du vice-consul David, etc., etc., — démontre que les deux premiers au moins sont fondés. Les faits dont il s’agit ne doivent pas donner lieu à des poursuites judiciaires ; ils rentrent dans l’application de l’article 20 du décret impérial du 4 juin 1806 concernant des faits qui entraînent la destitution ou des peines de discipline ou de correction.

Les conclusions de la commission sont soumises à l’Empereur qui, par une lettre datée de Bayonne le 6 mai 1806, renvoie l’affaire au ministre de la Guerre et fait repasser à M. Lacuée les pièces originales qu’il a transmises le 30 avril. Adoptant pleinement les conclusions de la Commission, qui sont aussi celles du prince vice-roi, Clarke, ministre de la Guerre, par un rapport en date du 16 mai 1806, propose à l’Empereur d’admettre à la retraite le général Malet. Le décret est signé le 31. L’Empereur accorde au général une pension de 2 000 francs. Les considérants de la décision ne sont pas publiés : ainsi échappe-t-il au déshonneur. Il garde son titre : il pourra se poser en républicain austère que le tyran a persécuté, alors qu’il n’est, comme dit l’Empereur, qu’un voleur « pour qui l’on a préféré la clémence à la pire rigueur des lois.


FRÉDÉRIC MASSON.